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QUESTION SYNDICALE

TOUT LE POUVOIR
AU SYNDICAT !

Pour un "Matignon" Rouge

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Église Réaliste - Janvier 2001

Le 25 mai 1968, s'ouvrent les négociations de Grenelle, qui se concluront par le Constat du même nom. Il s'agit d'une Conférence au Sommet entre "partenaires sociaux" (Patronat et Syndicats jaunes), sous arbitrage du Gouvernement, en vue de mettre les salariés grévistes au pas. En juin 1936, des négociations du même type avaient eu lieu à Matignon.

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Sommaire

- Tout le Pouvoir au Syndicat !

 

Annexes et Documents :

- Non Possumus !

- Préambules 1958-1946

- Se faire reconnaître...

- Droits de l'Homme - 1793

- Non ! Nous ne sommes pas représentés !

- 1789 et 1936

- Dissidence Civique !

- La Société du Code Pénal

- Réveil Rouge de la Masse !

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Tout le Pouvoir
au Syndicat !

"Coupons le câble,
il est temps !"

Sieyès - 10 juin 1789

Dans la période de scrutins à jet continu dans laquelle nous sommes entrés, il est bon de prendre un peu de recul et de faire le point sur quelques éléments de base selon lesquels on doit aborder la Politique.

Constitution

Il paraît que la nation française est pourvue d'une loi fondamentale, de ce qu'on appelle depuis 1789 une Constitution. De fait, nous vivons sous un régime dénommé Vème République, qu'a sanctionné un texte intitulé Constitution de 1958, modifié en 1962, et dont les dispositions furent infléchies par les traités européens récents.

Mais cela veut-il dire que nous sommes dotés d'un régime constitutionnel au sens historique de l'expression, c'est-à-dire au sens de la bourgeoisie moderne, civilisatrice et révolutionnaire de 1789 ?

En aucune façon ! Je prétends au contraire que la France n'a PAS de Constitution, et que le chiffon de papier qui porte en en-tête la formule "Constitution de la Vème République" n'est qu'une sorte de cache-misère d'un authentique régime d'Arbitraire Barbare bien plus systématique que ce que les Constituants de 1789 nommaient le "despotisme" du monarque absolu dégénéré qui trônait à Versailles.

En vertu de quoi faudrait-il s'en laisser imposer par le mot "Constitution" ? Qui m'empêche de ficher une plume d'oie dans ma chevelure, ou de me charger la tête d'une enclume, et de tirer prétexte de cette situation pour soutenir mordicus que je possède un chapeau ? Or, c'est exactement ce langage d'aliénés mentaux que les maîtres du système existant voudraient que vous et moi gobions sans sourciller. Pour ma part, je répète après les apôtres de l'Évangile : "Pas question !" (Non possumus - Actes IV/19).

Je sais très bien que ce que j'avoue sereinement et proclame sans détour est tout autre chose qu'une profession de foi Abstentionniste. Je sais que cela tranche tout autant avec les invocations à la Révolution qu'on trouve gribouillées sur quelques feuilles portant l'emblème du Drapeau Noir, de la Faucille et du Marteau ou de la Croix Celtique, et qui bénéficient néanmoins d'un numéro de Commission Paritaire préfectoral !

Mon discours, certes, entre dans la zone dangereuse des vérités point du tout bonnes à dire. Mais ce qui est, est, n'est-ce pas ? Et je me veux volontiers nouvel Ananie qui fit tomber des yeux de Saul les écailles qui lui bouchaient la vue (Actes IX/18).

Ce n'est pas ma faute si les maîtres du pouvoir nous chantent sur tous les tons le refrain des Droits de l'Homme. Si je les prends en flagrant délit de perversion intellectuelle et morale à cet égard, il n'auront qu'à s'en prendre à eux-mêmes !

Préambules : 1958-1946

La Constitution de 1958 n'a pas été mijotée par des bavards. Son Préambule est expédié en trois paragraphes, à la manière du traîne-caserne, l'inoubliable batteur de godillot, "le Général".

Le Préambule nous informe que ses auteurs sont "attachés à la Déclaration des Droits de 1789, complétée par le préambule de la Constitution de 1946". L'histoire de 1789 "complété par" 1946 est mauvais signe : ça fait rapiécetage d'un vieux paletot déchiré ou passé de mode. Qu'on le veuille ou non, il nous faut aller jeter un œil au "complément" de 1946.

Ahi ! mal nous en a pris ; avec le Préambule de 1946, on plonge dans une logorrhée qui n'est pas loin de consommer trois fois plus d'encre que la Déclaration de 1789 ! Fort heureusement, dans ce Dédale tout à fait dans le style "tripartisme" et s'efforçant d'amadouer la troupe thorézienne, avide de poudre aux yeux "sociale", je trouve ce que j'y cherche :

"Tout homme peut défendre ses droits et intérêts par l'action syndicale, et adhérer au syndicat de son choix". Ailleurs, on trouve d'autres fantaisies du genre : "la nation protège les mères et les enfants". Mais on n'a pas oublié de rappeler au "peuple" qu'il jouit de la Liberté entière s'il n'en "abuse pas" ; que les "conditions de son exercice" sont précisées en détail dans le Code Pénal (on dit "dans la loi" par euphémisme), et qu'en "période d'exception" il sera préférable d'en oublier jusqu'au nom…

Syndicat ?

C'est la question Syndicale qui me préoccupe. Dans le Préambule pléthorique des "héros de la Résistance", en partant semble-t-il du principe que "nul n'est sensé ignorer la loi", on passe allègrement sous silence que "par ailleurs" les vocations syndicalistes éventuelles, qui pourraient s'éveiller en entendant parler de "tout homme", de "son choix", devront en rabattre, quand on leur apprendra à quels critères précis il faut répondre pour se lancer dans l'aventure. En fait de critères, le pétulant candidat au dévouement syndical va découvrir qu'on exige de lui quelque chose qui ressemble comme deux gouttes d'eau aux lourdes et humiliantes concessions que les Romains arrachaient aux vaincus dans la cérémonie qui s'appelait "passer sous les fourches caudines". Description des "fourches caudines" de notre "droit syndical" :

1- Il faut prononcer le Vœu intérieur de ne s'intéresser qu'à des problèmes "professionnels", strictement "économiques" ;

2- Il faut se résoudre à la démarche extérieure d'aller faire encarter le groupement de ses collègues de travail chez monsieur le Préfet ; ce dont il sera donné avis au Procureur de la République ;

3- Le Syndicat ne sera pleinement agréé, jugé "Représentatif" que par décision du pouvoir Exécutif, c'est-à-dire avec l'aval du ministre de la Police et du ministre de la Guerre.

 

Il est vrai que ceux qui, incorporés aux Centrales "représentatives", ont réussi tous les tests du syndicat "responsable", y trouvent une récompense méritée : ils deviennent membres de droit de la Caste Noire dominante, avec tous les "avantages" et "garanties" qui s'ensuivent :

• D'abord, le tapis rouge leur est déroulé pour concrétiser leur monopole syndical, et "parachuter" leurs "délégués" et experts en gestion des "ressources humaines" dans les "grosses boîtes"… et les moins grosses.

• Ensuite, il y a tout un "plan de carrière" qui s'ouvre alors pour une nuée de professionnels du jésuitisme d'entreprise, avec tout l'éventail hiérarchique souhaité : simples "salariés" spécialement "protégés" par le Code et primés par le parasite d'employeur direct ; le bon créneau du "C.E." (comité d'entreprise) et C.H.S. annexe (comité d'hygiène et sécurité) ; les joyeuses perspectives de la Formation Permanente et autres Maisons de Retraite corporatives-paritaires ; les réseaux adjacents des Prud'hommes et de l'Inspection du Travail ; la gestion juteuse des Caisses de Retraite-Prévoyance ; les planques de toutes sortes dans l'Associatif, le Coopératif et le Mutuellisme ; les Administrateurs et leurs potes du secteur Public fonctionnarisé, public ou concurrentiel ; les renvois d'ascenseur dans le Municipal, le Cantonal, le Départemental, avec le "culturel", le "logement social", et j'en passe ; enfin cela peut aller jusqu'au Conseil Économique et Social et les institutions Européennes et Onusiennes !

Oui mais, doit-on se demander : avec cette Administration Jaune du Salariat, triée sur le volet du Parasitisme économique et du Banditisme politique, administration elle-même mouchardeuse et népotiste, que devient la libre association syndicale ? Elle devient l'objet d'une interdiction systématique, ce qui est d'ailleurs le but recherché.

Voilà donc comment il faut lire entre les lignes le Préambule de la Constitution de 1946, sanctifié par le "Général" en 1958 : "Tout homme peut adhérer au syndicat de son choix", … parmi les seuls syndicats Jaunes prévus et tolérables par le système Barbare existant !

Conseils !

J'attire l'attention des néophytes en droit Constitutionnel, et des braves gens qui comprennent les phrases creuses sur les "droits de l'homme" comme on veut qu'ils les entendent, c'est-à-dire en prenant leurs désirs pour des réalités, sur le fait que la liberté syndicale ne figure PAS dans la Constitution. Ceci est très significatif, et même décisif pour juger de l'Arbitraire Barbare auquel nous sommes soumis, sous couvert de République Constitutionnelle.

On voit bien signaler le syndicat, par allusion à 1946, donc indirectement, et par une mention d'un Préambule à un autre ; mais un Préambule n'a jamais eu pour objet de définir un droit ou une institution Positifs ; tout au contraire, la Déclaration de 1789 proclamait explicitement des Principes, et par surcroît des principes se voulant Naturels. Entre parenthèses, le préambule qui évoque à la hâte les "Droits de l'Homme" de 1789, sans donner le titre complet des droits "de l'Homme ET du Citoyen", montre le peu de cas que le Général et son équipe de Juristes (Debré et Cie) faisaient de la Déclaration de 1789 !

On "croise" encore le fait de l'existence de syndicats, par la force des choses, au Titre X de la Constitution de 1958, qui est consacré au "machin" qu'est le Conseil Économique et Social (C.E.S.). Il le faut bien, puisque le C.E.S. est "paritaire", réunit les "partenaires sociaux" ! Mais le C.E.S., gonflé dans la Constitution autant que le syndicat y brille par son absence, cela ne porte pas à conséquence, puisque le C.E.S. n'est qu'un "Conseil" !

Ah ! des conseils, on en a "en veux-tu, en voilà", dans notre régime d'Arbitraire Barbare ! C'est même sa caractéristique. Dans le cas du C.E.S., sa composition n'est pas précisée dans la Constitution, et reste complètement occulte pour le grand public. La bobine des 300 "sénateurs" du social qui composent le C.E.S. ne fait même pas l'objet d'une "photo de famille" comme c'est le cas des Conseils d'Administration des Sociétés Anonymes. Ce que l'on peut apprendre sur le C.E.S., en bon "conseil" qu'il est, c'est qu'il "donne son avis".  Quand ? Quand il "est saisi" de certains problèmes par le Gouvernement. Quels problèmes ? Toutes sortes de problèmes économiques et sociaux, y compris le Plan, mais à l'exclusion de la "Loi de Finances"… Ça doit valoir le coup de visiter ce Zoo qu'est le C.E.S. !

Je résume : le syndicat ne figure PAS dans la Constitution, tout comme le Personnel d'une entreprise ne figure pas à son Bilan, bien que les étudiants en Comptabilité doivent pourtant savoir réciter par cœur la définition d'un bilan comme "photographie de la richesse de l'entreprise"…

Parti ?

Je devine que des gens malheureusement "instruits" vont me répliquer : les syndicats ne faisant pas de Politique, il suffit que la Constitution traite du rôle des Partis ! J'y viens.

Dès le Titre I, traitant de la "Souveraineté", la Constitution dit : "La Souveraineté nationale appartient au peuple, qui l'exerce par ses représentants (et par la voie du Référendum). Les partis et groupements politiques concourent à l'expression des suffrages". Apprécions avec quel respect pointilleux le principe de la "souveraineté du peuple" se trouve ici revendiqué… dans les formes ! Mais nous connaissons nos lascars ; et l'épicier personnel du Pape pourrait me certifier qu'il avale un kilo d'hosties par semaine, que je garderais ma certitude qu'il ne croit ni à dieu ni à diable (et je n'aurais pas grand mérite, 400 ans après Luther) !

Montesquieu

Je passe sur la course d'obstacles nécessaire pour fonder un parti, dont l'activité est elle aussi bordée par le Code Pénal.

Pour ce qui nous occupe, la question Syndicat/État, que penser de l'"expression des suffrages" de nous autres "sondés", auxquels on accorde gracieusement des scrutinades qui, toutes, ont un caractère plébiscitaire ?

On dit que le Syndicat ne doit s'occuper que de questions "économiques", qu'il doit être A-politique ; c'est pour dire tout simplement que l'horizon syndical doit se restreindre à un "paritarisme" entre Jaunes syndicaux et Parasites, en proscrivant toute perspective de "Travail Associé" pour le Salarié-Indigène ; c'est donc bien l'Économie qui est interdite au Syndicat, et non pas d'abord la Politique ! Réciproquement, est-il dit que le Parti ne doit faire que de la Politique et "pas" d'Économie ? Comme on impose le syndicat A-politique, il faudrait bien, en effet, poser le parti A-économique ! On voit dans quelle embrouille de crétins génétiques nous placent les barbares dominants ! Ils nous servent une théorie de la "séparation des pouvoirs" qui aurait fait pleurer Montesquieu. Tout ce fatras officiel de la Caste Noire dominante se ramène à une seule chose : point de Droit, point de Peuple ! Nous ne tolérons qu'une Masse maintenue dans le Devoir !

La vérité, en matière de Parti et de Politique, c'est que tout le cirque "consultatif" n'a pour objet que d'enjoindre périodiquement et de façon solennelle, un peuple, traité comme une Masse Indigène, de "faire soumission" devant la Caste Noire véritablement étrangère et occupante. En matière de Parti et de politique, ce n'est pas de lire la prétendue Constitution dont nous avons besoin, mais de nous instruire de l'expérience du Viêt-minh indochinois et du F.L.N. algérien !

Notre régime d'Arbitraire Barbare s'est installé par le canon du "républicain" Cavaignac en juin 1848, et il s'est "institutionnalisé" avec le "restaurateur du suffrage universel", Napoléon III, qui porta aux urnes la masse indigène de France au moyen du "parti" dénommé "Société du Dix Décembre" composé de propagandistes armés de casse-têtes, confortés par les "candidatures officielles" du Flic suprême Persigny.

Jaunes et Bandits

Nous n'en sommes plus là, dira-t-on ? Certes, la pacification de la Masse nationale indigène s'est sophistiquée ; c'est-à-dire qu'elle a été portée à une extrême intensité, sans le moins du monde écarter l'épée de Damoclès du recours à la soldatesque.

Savez-vous que la "ficelle" principale de la sophistication de l'emprise des Partis policiers sur le pays consiste dans l'extension du filet de l'Administration syndicale sur la Masse ? Je cite un "expert" en Bureaucratie syndicale, héraut du "Syndicalisme Indépendant", dans la veine du Populisme de Droite, inspiré par Charles Maurras et Mgr Lefèvre. Mon auteur a publié en 1998 un volume ayant pour titre "Ni Rouges, ni Jaunes", dans lequel il déclare ingénument :

"Les Partis sont trop vulnérables pour pouvoir se passer d'un écran protecteur : il est primordial qu'ils trouvent dans les entreprises un Syndicat comme structure d'accueil. Le Syndicat permet au parti une action continue et en profondeur (permanente et de masse). Le Syndicat offre deux avantages au parti : d'une part il est présent officiellement dans l'usine ; d'autre part les délégués syndicaux bénéficient d'heures rétribuées pour mener leurs activités."

 

Voilà ce qu'il en est de l'A-politisme des Partis, et de l'A-économisme des Syndicats, dans notre régime d'Arbitraire Barbare ; les Jaunes syndicaux sont la "base" des Bandits politiques, avec la contribution essentielle des Parasites économiques (c'est "à l'usine" qu'on prépare les élections plébiscitaires, et non pas dans la commune ou l'arrondissement comme en 1789 !).

Souveraineté !

Quelle honteuse comédie, que le baratin "constitutionnel" selon lequel "la souveraineté, chez nous, appartient au peuple, qui l'exerce par les Partis" !

1- On veut nous faire accroire que nous avons conservé :

• un régime de Liberté constitutionnelle, comme en 1791 et en 1799 ;

• et même une République, comme en 1792 et en février 1848 ;

• et jusqu'à la Démocratie, comme du temps des Montagnards de 1793 et des Communards de 1871 !

2- Quel culot ! Quand on sait de quoi il retourne réellement, voici ce qu'on découvre, comme régime permanent et forcé qui nous fut progressivement infligé depuis 150 ans :

• un pseudo-Parlement à deux Chambres, en rebaptisant les "Pairs" de la Monarchie absolue "Sénateurs" de la République d'arbitraire ;

• à la tête de la Barbarie politique, on a droit, en lieu et place du Monarque dégénéré, en vérité de "droit satanique", au Président de "droit léonin" qui nous fait clairement comprendre ceci : j'ai pour moi les Rapaces de la Technocratie, les Sbires de la Soldatesque, et les grands Eunuques du Syndicat Jaune ; essaie donc, misérable Masse indigène, de broncher !

Ne pas oublier surtout, que notre 1er Président de la République fut Napoléon III en décembre 1848 ; et que le second fut un autre "impérialiste", le commandant des "Versaillais" de la "Semaine sanglante" de 1871, le dénommé Mac-Mahon, "élu" en 1873.

• La République Autocratique bien assise, on eut ensuite l'éducation des citoyens-indigènes au système des Décrets-lois de l'Exécutif. Ça n'a pas empêché de conserver le "hochet" des deux chambres !

• Enfin, la nation-indigène fut mûre pour qu'on lui fasse enfiler la camisole de force du "tout-plébiscite" officiel : la "République" à Référendum du général Présidentialiste.

 

Et dire qu'on a l'aplomb de nous qualifier cet odieux régime d'Arbitraire Barbare au moyen de l'expression pompeuse : "pouvoir DU peuple, PAR le peuple, et POUR le peuple" !

Nous verrons bien comment tout cela finira ! Cela promet, à coup sûr, ce qu'annonce Saint Luc :

"Il y aura des pleurs et des grincements de dents."

(Luc, XIII/28)

Silence !

Est-ce que cela peut durer indéfiniment, un tel régime où, d'un côté on nous chante que la souveraineté appartient au peuple, par ses partis et où, de l'autre côté, ce même pauvre peuple s'entend aboyer partout : "pas de politique !" Silence !

 

- à l'Entreprise : tu y travailles ; pas de politique !

- dans la Rue : tu circules ; pas de politique !

- à la Maison : tu télévises ; pas de politique !

- à l'Armée : tu obéis ; pas de politique !

- à l'Église : tu t'humilies ; pas de politique !

- à l'École : tu bachotes ; pas de politique !

 

Oui, pas de Politique "grâce" aux Partis ; comme pas d'Économie, "grâce" aux Syndicats ; c'est cela le fin fond du régime Barbare. Et cela veut dire : pas de Peuple, mais seulement une Masse ; et par suite pas de Constitution, mais seulement l'Arbitraire officialisé.

• Sous prétexte d'A-politisme du Syndicat, c'est la perspective nécessaire du Travail Associé en Économie, c'est-à-dire du Socialisme, qui est frappée d'Interdit.

• Sous prétexte d'A-économisme du Parti, c'est la perspective nécessaire de la Loi du Nombre dans l'État, c'est-à-dire du Démocratisme, qui est frappée d'Interdit.

Il faut remonter plus haut, jusqu'à l'usage qui nous est permis de nos cerveaux.

• Sous prétexte de Laïcité, c'est la vieille Philosophie qui est frappée d'Interdit, c'est-à-dire le besoin civilisé primordial de se poser la question du Pourquoi de la Vie et de la Pensée, du Pourquoi de la Nature et de la Société. Y songer même un instant est tenu par la Barbarie intégrale dominante pour un signe d'Intolérance, le germe du Fanatisme.

Préambules : 1946-1789

Je peux maintenant revenir sur le point qui fut le départ de mon exposé : sur le surprenant "jumelage" qui est fait dans notre soi-disant Constitution, entre le préambule de 1946 et la Déclaration des Droits de 1789.

Ce même flou énigmatique s'exprime plus largement, dans le fait que l'O.N.U. a cru devoir "compléter" la Déclaration de 1789 par une autre, dite "Universelle", en 1948.

Où a-t-on été pêcher, pour commencer, que la Déclaration d'août 1789 avait un caractère "régionaliste" ! Ce n'est bien sûr pas de cela du tout qu'il s'agit. Quand je pense que Staline a cautionné ce marécage des deux Déclarations, et que la Chine actuelle se débat défensivement dans ce purin !

Veut-on percer le secret du "hiatus" qui se fait jour dans notre prétendue "Constitution", entre la référence à 1789 et celle à 1946 ? C'est simple : sous couvert que 1946 "complète" 1789, on déclare la guerre à la Déclaration des Droits de la grande Révolution !

• Voyez-vous, les droits "Naturels" de 1789, qui invoquaient par-dessus le marché le droit Divin suprême, n'étaient que des "abstractions", de la Métaphysique, sur le plan intellectuel, et donc la source nécessaire du Fanatisme.

• Il n'est pas étonnant que, dans ces conditions, la Constitution qui faisait suite à la Déclaration, fut infectée par une conception Individualiste de la Citoyenneté et de la Propriété, ce qui ne pouvait mener qu'à la Théocratie de Robespierre, appelant à son tour le Césarisme de Napoléon.

Je tiens à faire savoir que je ne vais pas chercher cette analyse de la grande Révolution chez les "Ultras" émigrés à Coblence, à St Petersbourg et à Londres ; c'est dans les "histoires du mouvement ouvrier et socialiste", où l'on s'incline même devant "le grand homme Karl Marx", que je la détecte, soigneusement enveloppée de grandes tirades sur le "progrès social" !

Société normale !

Où veut-on donc en venir, dans cette opération de destruction oblique des Principes de 1789 ?

On veut nous faire entendre qu'avant 1835/1845, avant Robert Peel et Cobden dans l'Angleterre de 1840, et avant le massacreur Démocrate Cavaignac et le Fasciste Napoléon III dans la France de 1848, les "travailleurs" étaient livrés au "capitalisme sauvage" ; qu'alors, et précisément parce qu'on prenait encore au sérieux les "droits de l'homme et du citoyen", la Masse était privée de tous droits ; pensez donc : pas de suffrage universel, ni droit de grève ni droit syndical !

Pour messieurs les chefs "ouvriers" à la mode du Parti "travailliste" d'Auguste Comte et du Syndicat "solidariste" de Joseph Proudhon, c'est une fois que l'armée eut saigné et mis à genoux le Salariat, à Londres et à Paris, que commença la saine histoire, constructive et débordante d'"acquis sociaux".

Pour ces messieurs, l'histoire sérieuse, pleine de sollicitude pour le salariat et le peuple, présupposait qu'on mette sévèrement au pas cette masse enivrée des principes de 89 et pour cela offerte en proie aux "meneurs" Utopistes. Cela se paie, le "progrès social" !

Enfin, suite à l'énergique correction infligée au salariat pour le dégriser vis-à-vis de 1789, une rééducation populaire méthodique put être entreprise, dans le sens d'une société "normale" :

• Les Devoirs naturels de l'Homme seront désormais l'aliment intellectuel, ce qui se passe très bien de toute référence superstitieuse à un quelconque Créateur, renvoyé dans le séjour impénétrable qui lui convient. Admirez donc comme le dogme agnostique officialisé est la formule vainement recherchée jusque-là, pour le dressage des masses à la Tolérance ! Quel miracle obtenu par le Pragmatisme mental de 1845, substitué à la Métaphysique des Rousseau et Bentham qui avait enfanté la Déclaration des Droits !

• Sur de tels nouveaux principes, réduits enfin au Bon Sens, c'est un jeu d'enfant de promulguer une Constitution du Sens Commun, une Charte pour Bons Citoyens et Dociles Propriétaires. Il suffit que cette Constitution s'en tienne d'un côté à quelques formes cérémonielles et annonce très catégoriquement de l'autre côté qu'elle renvoie pour le reste aux Codes que réclament l'Intégration Administrative de la Masse et la Charité Organisée. Car il va de soi que le pragmatisme théorique doit s'incarner dans une simple Gestion adroitement Totalitaire !

Est-ce que l'on comprend, à présent, pourquoi le Préambule de 1946 de notre pseudo-Constitution y "télescope" nécessairement la Déclaration des Droits de 1789 ? C'est pour ramasser l'esprit des Devoirs de l'Homme de 1845, nécessaire introduction de notre Anti-Constitution de 1958 !

Est-ce qu'on comprend, maintenant, pourquoi règne de nos jours un climat sceptique et même un véritable malaise, une impression de terrorisme intellectuel dans la masse, face au refrain officiel sur les "droits de l'homme" et "l'État de Droit" ?

Forfaiture et Trahison

Il est temps d'instruire le procès du régime absolument Anti-Constitutionnel qui est le nôtre (en même temps que celui de l'Europe et de tout l'Occident).

1- Droits de l'homme et du citoyen à la sauce 1948, Constitution au modèle 1958, bric à brac des Codes administratifs et "sociaux", Présidence, Conseil des Ministres, Parlement ; tout cela ne représente plus que les oripeaux, les loques institutionnelles de ce qui fit la civilisation Moderne et Révolutionnaire. Toute cette machine sociale qui nous est actuellement imposée est Vermoulue au dernier degré, follement Dispendieuse, et d'une Absurdité sans nom. Cette machine sociale n'est plus que le lit de douleur qui supporte l'humanité civilisée malade. Si nous repensons au tableau que fait St Augustin, dans la "Cité de Dieu", des institutions romaines antiques en putréfaction achevée, nous serions tentés de regretter cette époque de ruine civilisée partielle !

2- Que signifient donc les Conférences au Sommet des "partenaires sociaux", Patronat-Syndicats sous arbitrage du Gouvernement, de type Matignon/1936 et Grenelle/1968, quand le vrai problème "social" de l'Occident arrive au premier plan ? Pourquoi, alors, les prétendus "représentants du peuple", les Députés au premier chef, par qui dit-on ce même peuple "exerce sa souveraineté", passent-ils à la trappe, s'évanouissent-ils dans la nature ? Dans quel "Titre" (Chapitre), à quel Article de la Constitution, des Matignon et des Grenelle sont-ils prévus ?

Comment se fait-il que les Syndicats se pressent les premiers dans ces Conférences absolument Anti-Constitutionnelles ? Pourquoi ne déposent-ils pas auprès du Conseil d'État une plainte pour Forfaiture institutionnelle contre le Parlement et le Gouvernement ? C'est qu'ils sont de leur côté institutionnellement complices du même crime de Haute Trahison ; et eux, qui n'existent pas dans la Constitution (!) se font au contraire organisateurs de ces véritables Coups d'État que sont les Matignon et les Grenelle !

3- Que signifie la rituelle présentation de vœux aux "Forces Vives" de la nation, qui désignent encore Patronat et Syndicat, cérémonie à laquelle se prête le Président de la République ?

Comment ! Patronat et Syndicat seraient les "forces vives" du pays, et ne seraient pas les agents désignés de la Souveraineté dans la Constitution ? Cette fois, c'est le "parrain" de la Caste Noire dominante, le Président de la République, qui se trouve sous le coup du crime de Forfaiture, de Haute Trahison !

 

Matignon, vœux aux Forces Vives ? Ce sont bien là des parades macabres, au cours desquelles les piliers de la Caste noire rendent en corps leur culte commun de juin 1848 et du 2 décembre 1851 !

Voilà, me semble-t-il ce que dirait aujourd'hui Jean-Jacques, en oubliant alors d'écrire son "Contrat Social". Et il ajouterait : honte à nos Partis ! Honte à nos Syndicats ! Malheur à notre Anti-Constitution !

Jaunes et Fantoches

Il est ainsi établi que notre pays (tout comme l'ensemble des pays du Nord du monde) est dépourvu de toute Constitution, au sens historique, civilisé, du mot. En guise de "Constitution", c'est bel et bien d'une Anti-Constitution dont nous sommes affligés, anti-constitution qui officialise simplement la domination de la Barbarie Intégrale, le régime d'une Caste Noire sur la Masse de la population.

Mais pourquoi, alors, les "coups d'État" anti-populaires périodiques, de type Matignon-Grenelle ? C'est que sous le régime même de l'Anti-Constitution, de la Civilisation en putréfaction, la nécessité historique du Social-Démocratisme se fait spontanément sentir dans notre secteur Nord du monde.

Pareillement, de façon complémentaire, les "Parlements" barbares mondiaux que furent la S.D.N. et l'O.N.U. manifestent de manière pressante la nécessité historique pour le secteur Sud du monde, de relations "diplomatiques", "nationales", à caractère Démocrate-Socialiste, qui présupposent que de vrais Partis "nationaux" aient éliminé les seuls partis Fantoches actuellement tolérés.

Ainsi, de même que les partis Fantoches doivent faire bloc avec le F.M.I. et les Casques Bleus, nos syndicats Jaunes doivent faire bloc chez nous avec le Gouvernement Policier et la Technocratie Parasitaire.

Tout ceci est aisément compréhensible pour le mouvement populaire spontané du monde, aussi bien pour le Syndicat Rouge au Nord que pour le Parti Rouge au Sud.

En ce qui concerne les Nouveaux Marxistes (l'Église Réaliste), il est évident que le Socialisme-Démocratique du Nord mène au "Salaire Gratuit", et que le Démocratisme-Social du Sud mène au "Gouvernement Mondial" ; et enfin que tout cela ensemble converge vers le régime universel de Gratuité-Volontariat sur toute la ligne, régime de Liberté-Égalité au sens plein des termes, que résume l'expression : Communisme Épanoui.

République Syndicale

Il résulte de tout ce qui précède une conclusion très-surprenante, mais non moins irréfutable historiquement : si d'un côté, et malgré les apparences mensongères, nous n'AVONS PAS de Constitution, de l'autre côté, il ne nous FAUT PLUS, irréversiblement plus, de "Constitution" au sens historique du mot. C'est cela, précisément, qui caractérise l'époque Contemporaine de crise finale de la Civilisation et, avec celle-ci, de crise générale de toute la Préhistoire humaine.

En effet, dès que s'imposera un Syndicat digne de ce nom, un Syndicat Libre, un Syndicat Rouge, on doit nécessairement déboucher sur un Matignon ou Grenelle à l'envers, sur une "Conférence au Sommet" cette fois Populaire et non plus Barbare. Un tel Matignon Rouge ne peut, à l'évidence, que donner le jour à une République d'essence Syndicale, quoique comportant un aspect subsidiaire partisan (de Parti). La délivrance populaire marche donc vers la République Syndicale-Partisane ; ce qui peut se dire République Syndicale en abrégé. (Je parle pour le Nord du monde, à commencer par l'Europe où nous nous trouvons).

Le fond et la forme

Est-ce que la République Syndicale Rouge Européenne a besoin d'une "Constitution" ? Pas du tout au sens historique, civilisé, du mot !

• Une Constitution consacrait la direction d'une Minorité sur le peuple majoritaire, alors que la République Syndicale pose le principe de la direction du Peuple sur la Minorité barbare déchue.

• Une Constitution envisageait directement la relation Minorité/Majorité dans les limites Nationales, alors que la République Syndicale a son horizon directement ouvert sur l'Humanité planétaire.

• Une Constitution se proposait de définir un état parfait de Propriété-Citoyenneté, alors que la République Syndicale se propose d'abolir le Marché et l'État, l'Argent et les Armes.

 

Sur le fond, donc, la République Syndicale répugne à toute Constitution au sens classique, en particulier au sens de la Révolution Française.

Dans la forme, cependant, la République Syndicale à sa fondation, et pour une période de Transition prolongée vers le Communisme Épanoui, devra consentir à se doter d'une "Constitution", et même rechercher à ce qu'elle soit la plus précise possible, et la mieux adaptée à chaque étape de la Transition. Le "dépérissement" du Marché et de l'État ne se fait pas à l'aveuglette ! Et il y a loin d'une zone libérée stable du type République Syndicale Européenne, jusqu'à l'initiation de la Transition à l'échelle mondiale !

 

La forme nécessaire de République Syndicale que doit prendre le régime de libération populaire au Nord du monde fut déjà signalée en un sens par les Bolcheviks russes, quand ils nommèrent le régime nouveau "République des Soviets".

En effet, Staline écrit dans ses "Principes du Léninisme" de 1924 :

"Le pouvoir des Soviets substitue les UNITÉS DE PRODUCTION (ex-Entreprises) aux CIRCONSCRIPTIONS TERRITORIALES (nos communes). Le pouvoir des Soviets relie ainsi tous les Travailleurs à l'appareil administratif de l'État, et leur apprend ainsi à gouverner".

Soviets

En se limitant à cette citation, nous n'aurions rien à ajouter. On doit noter cependant :

• Notre Eglise ne conçoit pas son rôle à la manière du Parti bolchevik ; de sorte que "relier les Travailleurs à l'État" ne veut plus dire la même chose (ceci est traité ailleurs).

• Un second point, qui n'est pas sans lien avec le précédent, fait encore une différence : c'est que les Bolcheviks ont donné naissance à la République "FÉDÉRATIVE" des Soviets. Par ce biais "fédératif", les Circonscriptions réapparaissaient en force en U.R.S.S., en dépit de l'option théorique pour les Unités de Production.

Il y avait à cela plusieurs raisons : primo, la nécessité d'achever de Civiliser la Russie d'une manière générale, donc d'accomplir une tâche de la bourgeoisie Moderne dans de nouvelles conditions ; secundo, même dans ses régions civilisées, l'Empire Russe comprenait des marchés "nationaux" partiellement  distincts ; tertio, l'Empire Russe comprenait des zones proprement primitives ou semi-primitives (pré-civilisées), sortant d'une situation marquée par la Colonisation "slave".

 

Toutes ces restrictions, quant à l'identité de la République Syndicale qui est notre but, et de la République des Soviets, reparaissent dans la notion même de Soviets : quand on disait, en 1917, "Soviets d'ouvriers, de paysans et de soldats", en fait "paysans et soldats" coïncidaient pratiquement, pour l'essentiel ; et sous le terme de "paysans" se retrouvaient les restrictions rurale, nationale et coloniale que j'ai indiquées plus haut, sortant le Soviet du sens Syndical.

Il ne serait pas difficile de démontrer qu'en Chine en 1949, où la forme Fédérative ne fut pas adoptée, les conditions étaient encore plus éloignées qu'en Russie de l'établissement d'emblée d'une République Syndicale. Là, les "Régions Autonomes" prévues, pour les "minorités nationales", n'étaient que des modalités des Provinces de "l'État Uni" chinois.

 

Église Réaliste - Janvier 2001

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"Coupons le câble,
il est temps !"

Sieyès - 10 juin 1789

 

 

RÉPUBLIQUE
EUROPÉENNE
ROUGE !

Annexes
&
Documents

Non possumus !

Le prince des prêtres des juifs voulait interdire à Pierre et Jean de prêcher l'Évangile. Ces derniers répliquèrent :

"Quant à savoir si l'on doit plutôt obéir à Dieu qu'à vous-mêmes, prêtres et anciens, arrangez-vous avec votre conscience.

Mais en ce qui nous concerne, nous déclarons qu'il nous est absolument impossible (non possumus) de taire notre devoir historique envers le Peuple mondial, devoir qui s'impose à notre conscience".

Actes des Apôtres - IV/19-20.

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"Abu-Talib est pressé de toutes parts par les qoraïchites. Il est sommé d'exclure Mahomet du clan.

"Abu-Talib fait venir son neveu et lui expose la situation.

"Mahomet répond :

"Oncle, veux-tu m'abandonner ? Je te le jure, par celui qui détient mon âme : même s'ils m'apportaient en cadeau le soleil dans la main droite et la lune dans la main gauche, je ne renoncerais pas à ma foi et à mon Dieu. Le Dieu auquel je crois m'est un appui suffisant. Même si tu m'abandonnes. Fais-le si tu veux. Je reste avec Dieu".

"Abu-Talib annonce aux qoraïchites, qui attendent le résultat, que lui - Abu-Talib - reste fidèle à la foi de ses ancêtres et qu'il ne deviendra jamais musulman. Mais il refuse de livrer Mahomet. Tant qu'il vivra, il protégera son neveu. Conformément à la loi du clan."

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Préambules...

Constitution du 4 octobre 1958

Le Gouvernement de la République, conformément à la loi constitutionnelle du 3 juin 1958, a proposé.

Le peuple français a adopté.

Le Président de la République promulgue la loi constitutionnelle dont la teneur suit :

PRÉAMBULE

Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946.

En vertu de ces principes et de celui de la libre détermination des peuples, la République offre aux territoires d'outre-mer qui manifestent la volonté d'y adhérer des institutions nouvelles fondées sur l'idéal commun de liberté, d'égalité et de fraternité et conçues en vue de leur évolution démocratique.

 

ARTICLE PREMIER. - La République et les peuples des territoires d'outre-mer qui, par un acte de libre détermination, adoptent la présente Constitution, instituent une Communauté.

La Communauté est fondée sur l'égalité et la solidarité des peuples qui la composent.

TITRE PREMIER

De la souveraineté

ART. 2. - La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances.

La langue de la République est le français.

L'emblème national est le drapeau tricolore, bleu, blanc, rouge.

L'hymne national est "la Marseillaise".

La devise de la République est : "Liberté, Égalité, Fraternité".

Son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple.

ART. 3. - La souveraineté nationale appartient au peuple, qui l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum.

Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice.

Le suffrage peut être direct ou indirect dans les conditions prévues par la Constitution. Il est toujours universel, égal et secret.

Sont électeurs, dans les conditions déterminées par la loi, tous les nationaux français majeurs des deux sexes, jouissant de leurs droits civils et politiques.

ART. 4. - Les partis et groupements politiques concourent à l'expression du suffrage. Ils se forment et exercent leur activité librement. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale et de la démocratie.

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Constitution du 27 octobre 1946

PRÉAMBULE

Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés. Il réaffirme solennellement les droits et les libertés de l'homme et du citoyen consacrés par la Déclaration des droits de 1789 et les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République.

Il proclame, en outre, comme particulièrement nécessaires à notre temps, les principes politiques, économiques et sociaux ci-après :

La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme.

Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République.

Chacun a le devoir de travailler et le droit d'obtenir un emploi. Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances.

Tout homme peut défendre ses droits et ses intérêts par l'action syndicale et adhérer au syndicat de son choix.

Le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent.

Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises.

Tout bien, toute entreprise, dont l'exploitation a ou acquiert les caractères d'un service public national ou d'un monopole de fait, doit devenir la propriété de la collectivité.

La Nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement.

Elle garantit à tous, notamment à l'enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l'incapacité de travailler a le droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence.

La Nation proclame la solidarité et l'égalité de tous les Français devant les charges qui résultent des calamités nationales.

La Nation garantit l'égal accès de l'enfant et de l'adulte à l'instruction, à la formation professionnelle et à la culture. L'organisation de l'enseignement public gratuit et laïque à tous les degrés est un devoir de l'État.

La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international. Elle n'entreprendra aucune guerre dans des vues de conquête et n'emploiera jamais ses forces contre la liberté d'aucun peuple.

Sous réserve de réciprocité, la France consent aux limitations de souveraineté nécessaires à l'organisation et à la défense de la paix.

La France forme avec les peuples d'outre-mer une Union fondée sur l'égalité des droits et des devoirs, sans distinction de race ni de religion.

L'Union française est composée de nations et de peuples qui mettent en commun ou coordonnent leurs ressources et leurs efforts pour développer leurs civilisations respectives, accroître leur bien-être et assurer leur sécurité.

Fidèle à sa mission traditionnelle, la France entend conduire les peuples dont elle a pris la charge à la liberté de s'administrer eux-mêmes et de gérer démocratiquement leurs propres affaires ; écartant tout système de colonisation fondé sur l'arbitraire, elle garantit à tous l'égal accès aux fonctions publiques et l'exercice individuel ou collectif des droits et libertés proclamés ou confirmés ci-dessus.

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Se faire reconnaître...

Représentativité :

"L'octroi de la représentativité présente pour une centrale syndicale des avantages déterminants : possibilité de participer aux organismes où sont débattus les intérêts des salariés, financement par l'État de certaines de ses activités, monopole électoral, etc."

"Les groupes politiques sont trop vulnérables pour pouvoir se passer d'un écran protecteur ; il est primordial qu'ils trouvent dans un établissement, un syndicat comme structure d'accueil. Cela leur permet de mener une action continue et en profondeur. Un syndicat offre deux séries d'avantages ; d'une part il est officiellement présent dans l'usine, d'autre part les délégués bénéficient d'heures rétribuées pour mener leurs activités."

Extraits de "Ni Rouges, ni Jaunes",
de Didier Favre (1998).

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Droits de l'Homme
de 1793

Le peuple français proclame en présence de L'ÊTRE SUPRÊME (les) droits de l'homme.

L'oubli et le mépris des DROITS (NATURELS et imprescriptibles) de l'homme sont les seules causes des malheurs du monde.

La nécessité d'énoncer les droits de l'homme suppose la présence du DESPOTISME, ou le souvenir récent du despotisme.

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Les droits de l'homme sont : (LA LIBERTÉ),L'ÉGALITÉ, LA SÛRETÉ,LA PROPRIÉTÉ.

 

• LIBERTÉ :

La loi est l'expression libre et solennelle de la volonté générale. Le droit de manifester sa pensée, de s'assembler paisiblement, ne (peut) être interdit. Le droit de présenter des pétitions aux dépositaires de l'autorité ne peut en aucun cas être limité.

 

• ÉGALITÉ :

La loi est la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse. Elle ne peut ordonner que ce qui est juste et utile à la société ; elle ne peut défendre que ce qui lui est nuisible.

 

• SÛRETÉ :

Nul ne doit être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle a prescrites. Tout homme est présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable. La loi ne doit décerner que des peines strictement nécessaires, proportionnées au délit et utiles à la société.

 

• PROPRIÉTÉ :

Les secours publics sont une dette sacrée. La société doit la subsistance aux citoyens malheureux : soit en leur procurant du travail, soit en (leur) assurant les moyens d'exister.

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• SOCIETÉ :

Le but de la société est le bonheur commun.

 

• PEUPLE :

Un peuple a toujours le droit de changer sa Constitution. Une génération ne peut assujettir à ses lois les générations futures.

La garantie sociale consiste dans l'action de tous, pour assurer à chacun la jouissance et la conservation de ses droits.

 

• GOUVERNEMENT :

La résistance à l'oppression est la conséquence des autres droits de l'homme. Celui contre lequel on voudrait exécuter tout acte (administratif) arbitraire par la violence, a le droit de le repousser par la force. Ceux qui feraient exécuter de tels actes tyranniques doivent être punis.

Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est, pour le peuple et chaque portion du peuple, le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs.

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Non ! Nous ne sommes
pas représentés !

Extrait de "L'Indigène et le Plébiscite"
de l'Église Réaliste - 1995

Depuis 150 ans, la fraction française du peuple mondial devient la victime toujours plus désarmée du régime dominant de la Nouvelle Barbarie. Elle est le jouet toujours plus impuissant du capitalisme parasitaire et de la démocratie dictatoriale.

Ce n'est pas que la résistance à la crise générale de l'ordre civilisé ait fait défaut, au contraire : le mouvement pour sauver l'héritage civilisé, associé au but de l'émancipation du travail, fut repris sans relâche, à commencer par les Quarantuitards pour se poursuivre avec les Communards, les premiers Socialistes et enfin les premiers Communistes.

Cependant, au total, il semble que plus la cause du travail précisait théoriquement son objectif, moins elle devenait pratiquement agissante. C'est ainsi qu'aujourd'hui le mouvement pour la République Sociale Universelle semble quasiment anéanti, orphelin idéologiquement et dépouillé de toute organisation.

Il s'agit donc pour nous, en quelque sorte, de reprendre à zéro la Question Sociale correspondante. Ceci évoque une situation qui fait date dans notre histoire militante : celle de la publication du célèbre "Manifeste des Soixante", en février 1864.

Quelles étaient les circonstances qui amenèrent cet acte décisif d'une  poignée de salariés parisiens ?

Quinze ans auparavant, en 1848-1849, la première révolution du drapeau rouge avait été sauvagement écrasée par la nouvelle féodalité financière prenant sous son aile la vieille aristocratie terrienne. Ce fut donc la double défaite de la démocratie socialiste à Paris et du patriotisme internationaliste à Vienne.

En France, le régime du despotisme militaire instauré depuis Juin 1848 connut un premier ébranlement en 1857, l'année du "krach" boursier autrichien, avec l'entrée au Corps Législatif du "Groupe des Cinq". Cette insinuation d'une opposition respectueuse et "assermentée" dans le système du dictateur Napoléon III n'était rien d'autre qu'une offensive de revenants de la République de l'état de siège de 1848, dont Jules Favre, le futur héros de la "IIIème république versaillaise".

Un nouveau coup fut porté à la dynastie régnante par le Traité de Commerce de 1860. Dans l'atmosphère nouvelle du prétendu "empire libéral", l'Exposition Universelle de Londres de 1862 vit se rencontrer des délégués ouvriers français au pays du chartisme et des réfugiés de 1848. L'événement se produisait en plein réveil salarial, que manifestait la grève parisienne des typographes.

En juin 1863, les républicains de sa majesté à la Jules Favre, groupés autour du journal "Le Siècle", se voient contrés par une autre bande, qui affiche un "socialisme" de comédie, équipe de "saint-simoniens" d'alcôve impériale qui est menée par le "prince rouge" Jérôme Napoléon, dit Plon-Plon, et a pour organe "l'Opinion Nationale".

Le nouveau clan "oppositionnel" à l'Empire jette alors dans les jambes de ses rivaux des "candidatures ouvrières", en prévision des élections complémentaires de 1864. C'est ainsi que parut le "Manifeste des Soixante" en février 1864. Le manifeste, rédigé par le démocrate Henri Lefort, ami de Marx, au nom de 60 ouvriers parisiens, allait finalement se retourner contre ses promoteurs, et irréversiblement fausser le jeu des clans de "gauche" jouant aux républicains ou aux socialistes.

Cette même année 1864, en effet, en septembre à Londres, était lancée la 1ère Internationale (A.I.T.), à l'occasion d'un congrès en faveur de la Pologne opprimée. Alors le drapeau rouge, surgi 15 ans plus tôt dans l'action, rencontrait la pensée qu'il recherchait pour se soutenir, celle de Marx et Engels.

Quoiqu'il en soit, à l'échelle française, le Manifeste des Soixante, rompant avec les diversions des clans de "gauche" de politiciens face au despotisme militaire dominant, devait mener 7 ans plus tard, le 18 mars 1871, à la proclamation du 1er gouvernement ouvrier du monde, la Commune de Paris. Ici, le drapeau rouge, apparu sur les barricades de 1848, se maintint 72 jours au sommet de l'Hôtel de Ville d'une grande capitale du monde civilisé.

Le Manifeste des Soixante, dès sa parution, prit à contre-pied la gauche impérialiste, qui entra dans une rage révélatrice.

Perfide comme à son habitude, la Gauche se trouva immédiatement 80 "ouvriers" pour signer un contre-manifeste. Bien que ce texte et ses prête-noms soient tombés dans les oubliettes de l'histoire, il nous faut exhumer de quoi il retournait. Hautains et roués à souhait, ces Messieurs du contre-manifeste menaçaient :

- Les Soixante "n'expriment que l'opinion d'un petit nombre" ;

- Dans la lutte qui se développe contre l'Empire, il faut considérer que "depuis 1789, il n'y a plus que des citoyens" ; présenter des candidatures ouvrières reviendrait à abolir les "principes" de la Grande Révolution, consisterait à restaurer une conception corporative, de "castes" ; "nous n'avons pas détruit les privilèges en haut pour les rétablir en bas" ;

- "Lorsqu'on veut tout résoudre à la fois, on trouble son pays, on l'inquiète, on le jette dans les bras de la dictature" : poser des candidatures ouvrières, c'est "soulever mal à propos une question sociale, alors qu'il ne s'agit que d'une question politique" ;

- Bref, "les candidatures ouvrières n'aboutiraient qu'à diviser" ; "restons unis, repoussons énergiquement tout ce qui pourrait nous diviser", en soutenant exclusivement les candidats de la Gauche !

 

On le voit, l'engeance des politiciens de Gauche, "montagnards" en 1848, "républicains" en 1864, reste égale à elle-même : Une coterie de pêcheurs en eau trouble, un essaim de frelons ultra-"respectables" qui spéculent sur le mouvement populaire. C'est cette même race maudite que nous avons retrouvée en Mai 1968, n'hésitant pas à déverser des saletés du genre : "Cohn-Bendit juif-allemand" ; les étudiants sont des "fils de bourgeois" associés à des "casseurs", manipulés par un "chef d'orchestre international". Hâtons-nous de tirer la leçon, grand dieu ! À notre tour de crier : "plus jamais ça !", plus jamais de ces voyous politiques à vocation de kapos du salariat ! Vomissons une fois pour toute ce qui peut réincarner des Mendès-France ou des Georges Séguy !

Reprenons tout au contraire, l'esprit fier et audacieux du Manifeste des Soixante, nourri de l'expérience accumulée, adapté aux conditions présentes :

 

MANIFESTE

(Février 1864)

 

"Non ! nous ne sommes pas représentés ! La classe la plus nombreuse, le travail manuel n'est pas représenté". Tel est le cri des salariés qui domine et résume le Manifeste des Soixante.

 

"On nous dit qu'il n'y a plus de classes. Nous qui n'avons d'autre propriété que nos bras, nous affirmons que l'égalité écrite dans la loi est à réaliser dans les faits. Il nous reste à nous émanciper socialement."

 

"Les infirmités de la nature laisseront toujours à l'assistance un vaste champ pour s'exercer. Mais la maladie, le salaire insuffisant, le chômage, le travail des femmes et des enfants amenant la destruction de la famille ; bref, la misère imméritée, peut disparaître et elle disparaîtra. Nous repoussons l'aumône, nous voulons la justice."

 

"Nous qui avons le droit de nommer des députés, nous vivons sous des lois exceptionnelles. Faute de pouvoir nous réunir, nous associer librement, nous sommes impuissants. Ne pouvant résister par la liberté et la solidarité, nous entendre pour défendre le salaire, nous assurer contre le chômage, nous subissons la domination du capital."

 

"Par l'effort poursuivi en matière d'organisation du crédit, en organisant l'instruction professionnelle, nos rêves se réaliseront : Il n'y aura plus ni patrons ni ouvriers, ni bourgeois ni prolétaires."

 

"Vous ne connaissez pas les ouvriers en nous supposant un culte de l'esprit d'antagonisme, de la grève, qui épuisent leurs forces et où les adversaires ne trouvent en définitive que la misère pour les uns et la ruine pour les autres. Les ouvriers veulent marcher à la conquête de leurs droits avec énergie et persistance, mais pacifiquement."

 

"Nous ne disons pas : l'ouvrier est Rien, il doit être Tout. Avec la même ardeur que la bourgeoisie démocratique, nous voulons le suffrage universel dégagé de toute entrave, les libertés de presse et de réunion régies par le droit commun, etc. Parce que nous y sommes plus intéressés, nous sommes seulement ceux qui voulons plus énergiquement la vraie démocratie. Sans nous, la bourgeoisie démocratique ne peut rien asseoir de solide ; sans elle, l'émancipation du salariat démocratique peut être longtemps retardée. Unissons-nous !"

 

EN RÉSUMÉ

 

• "Les députés actuels, qui se disent nommés par tous et représentants de tous, ne parlent qu'au nom de la minorité : industriels, commerçants, militaires, journalistes. Bien que sans moyens ni fortune ni relations, il y a nécessité de candidatures et d'un groupe de députés salariés au Parlement."

 

• "Il y a encore plus nécessité de syndicats libres de salariés ; non pas de syndicats mixtes, sortes de prud'hommes professionnels qui nous donneraient un tribunal où nous juger, mais de syndicats composés exclusivement de salariés, élus au suffrage universel formant, face à la Chambre de Commerce, une Chambre de Travail."

"Nous ne haïssons pas les hommes,
mais nous voulons changer les choses."

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1789 et 1936

Extrait de "L'Indigène et le Plébiscite"
de l'Église Réaliste - 1995

Depuis 150 ans, le monde occidental, ce que l'on appelle mensongèrement les "pays riches", est tourmenté par un seul et unique problème fondamental qui est celui de la Question Sociale. Cette question, toujours lancinante et paraissant toujours insoluble, avait surgi au premier plan en 1848, en même temps que le drapeau rouge du salariat, avec le mot d'ordre du "droit au travail".

La bourgeoisie moderne légitima sa position dans la direction sociale par une lutte de 350 ans (1500-1850) qui fut couronnée par la publication des "Droits de l'Homme" en août 1789. Il reste au salariat à légitimer sa position dans la direction sociale en se montrant apte à faire triompher le "Droit au Travail". C'est pourquoi il est du plus grand intérêt de comparer les comportements respectifs des chefs de la bourgeoisie et des chefs du salariat. À ce titre, le meilleur enseignement peut être tiré en examinant parallèlement les événements de 1789 et ceux de 1936.

- 1789 -

La Révolution de 1789 se décida en l'espace d'un mois et demi, entre le 5 mai 1789, date d'ouverture des États-Généraux, et le 20 juin 1789, date du serment du Jeu de Paume. Entre ces deux dates, en effet, se produisit un renversement décisif de la situation : début mai, les députés du Tiers-État se présentaient en humbles solliciteurs devant tout l'appareil intact de la monarchie absolue ; fin juin, ils se dressaient fièrement comme la représentation populaire fondamentale, à partir de laquelle on devait nécessairement procéder à une refonte générale de l'ordre politique, édifier le nouveau système de la monarchie constitutionnelle, représentative.

La crise de la monarchie de droit divin remontait évidemment bien au-delà de la convocation des États-Généraux en mai 89. La cause dernière de la Révolution était même que la France, pourtant patrie de Jean Calvin, avait "loupé" sa Réforme au 16ème siècle et, partant, sa transformation décidée en nation moderne. L'échec de la Réforme en France fut marqué par la formation de la Sainte Ligue contre la France par le pape Jules II (1511) ; la domination des Guise à la mort de François ler (1547) ; le massacre des protestants à la St Barthélemy (1572) ; l'assassinat de Henri IV par les Jésuites (1610). La faiblesse de la bourgeoisie française la condamnait à être prise dans l'étau d'un système où une masse de métayers obtus était tenue en bride par une dictature royale. D'où la forme boiteuse adoptée par l'État moderne français, que caractérise le "gallicanisme" ; d'où encore la coloration typiquement "paysanne" des économistes français, de Boisguillebert à François Quesnay, forme contrebalancée par le "dirigisme" mercantiliste, de Barthélemy Laffemas au "colbertisme". Le retard français dans la modernisation du pays eut l'avantage de faire de la France le lieu de la dernière révolution bourgeoise, la plus radicale, celle qui en formula les principes achevés dans sa Déclaration des Droits, au nom du Déisme pur. Ainsi vit-on s'instaurer, en septembre 1792, la République française, qui résuma en elle toutes les expériences antérieures : La Fraternité de la République de Genève de Calvin (1541), la Liberté de la République batave de Guillaume d'Orange (1579), et l'Égalité de la République anglaise de Cromwell (1650). La révolution française fut conduite, avec Robespierre, à pousser jusqu'à ses dernières conséquences la lutte contre toutes les formes de l'absolutisme féodal ; de plus, elle fut amenée, avec Napoléon Bonaparte, à élever le combat récemment livré par la République américaine de Jefferson (1776) contre l'hégémonisme bourgeois de l'Angleterre au niveau d'une véritable croisade mondiale.

La cause "prochaine", immédiate, de la révolution française, ce fut la crise financière insoluble déclarée après les guerres étrangères et les "dragonnades" intérieures contre les Camisards, saignant le régime du Roi Soleil (1715). Cette crise éclata immédiatement par la banqueroute de Law et ses "mississipiens" (1720). Louis XV dit "Après nous le déluge". Dès l'avènement de Louis XVI (1774), la "guerre des farines" prend des proportions menaçantes ; la crise commerciale et industrielle de 1787 propulse la crise financière à un état aigu, de sorte que fin 1788, les insurrections paysannes amorcées en 1750 se reproduisent à un niveau ultime, faisant des provinces un brasier, tandis que des troubles plébéiens surviennent dans plusieurs villes. Le Trésor est à sec ; à l'Assemblée des notables, convoquée en janvier 1787, la noblesse se refuse à payer, et le roi se trouve acculé à convoquer les États-Généraux en août 1788 pour mai 1789. Les élections de députés et la rédaction des cahiers de "doléances" se déroulent dans une atmosphère d'intense fermentation sociale. Mais la monarchie, à bout d'expédients, n'entend précisément que recevoir les "doléances" des "États" et faire voter les "subsides", c'est-à-dire entretenir à tout prix le vieux système qui s'enfonce dans son aveuglement. Les États-Généraux doivent être inaugurés par des "prières publiques" pour la clique de dégénérés qui pillent le pays ; on doit s'y rendre "par déférence au désir de sa majesté" ; ils doivent se tenir à la manière du "roi séant en son lit de justice", chacun étant, comme devant "appelé à parler au roi à genoux" avant d'être "sommé de se retirer de sa présence à reculons". Les "lettres de cachet" menacent tout protestataire, de quelque "rang" que ce soit. D'ailleurs, les États sont convoqués dans le cadre de paroisses et baillages en lesquels le roi répartit "ses" peuples. Ces États, assemblés par le "bon plaisir" du monarque, doivent "naturellement" se répartir en trois chambres séparées délibérément par "Ordres" : les ordres "privilégiés" d'un côté, bénéficiant de toutes les "exemptions" fiscales désirables, et l'ordre des roturiers de l'autre, vache à lait des impôts et des emprunts. Six mois avant les États-Généraux cependant, par l'"arrêt royal" du 27 décembre 1788, Necker a fait accorder le "doublement du tiers", c'est-à-dire l'adoption de la règle selon laquelle le Tiers aurait autant de députés que les deux ordres privilégiés réunis. C'est l'ultime "sacrifice" que peut faire le régime aux abois, tolérer une "égalité" individuelle et théorique, contenue dans l'inégalité pratique du vote "par ordre", que l'on espère consolider par ce tour de passe-passe. Pourvu qu'on fasse cracher les "subsides", toutes les audaces de forme sont permises ! C'est la morale de tous les régimes à l'agonie : accorder tout ce qui peut être repris une fois l'orage passé. Ce qu'il est tout à fait hors de question d'admettre, alors, et qui parait même inconcevable à tous en un premier temps, c'est que se substitue à l'égalité qualitative des Ordres dans le cadre des États-Généraux, une égalité quantitative du vote "par têtes" au sein d'une Assemblée Nationale.

Les députés du Tiers-État aux État-Généraux n'étaient nullement "révolutionnaires". La plupart étaient riches, notables, avocats, négociants, hommes d'ordre. N'eut été l'impasse objective de la situation et la provocation "jusqu'auboutiste" des privilégiés irréductibles, nous n'aurions jamais eu la Grande Révolution. Personne ne soupçonnait l'abolition ultérieure de la monarchie, et beaucoup persistaient à déclarer : Le roi est bon, mais il a de mauvais ministres. La majorité des députés roturiers parlait simplement de lutter contre les "abus" et de "rétablir le peuple dans ses droits". Mais les choses prirent une autre tournure et aboutirent à la ruine définitive d'un régime qu'on se plaisait frauduleusement à dire exister depuis "14 siècles", depuis Clovis (500) ! C'est que face à l'épreuve, une phalange solide de députés populaires sut déployer le drapeau bourgeois tissé par 500 ans de combats depuis Etienne Marcel (1350).

En janvier 1789, l'abbé Sieyès, appartenant à l'ordre du Clergé, publia anonymement "Qu'est-ce que le Tiers-État ?". On y lit :

"Qu'est-ce que le Tiers-État ? Tout. Qu'a-t-il été jusqu'à présent ? Rien. Que demande-t-il ? À devenir quelque chose.

Mais, dira-t-on, ce sont là des choses impraticables pour le temps. Je ne me charge point de les pratiquer, mon rôle consiste à présenter la vérité.

Les esprits, dites-vous, ne sont pas encore disposés à vous entendre, vous allez choquer beaucoup de monde. Il le faut : la vérité la plus utile à publier n'est pas celle dont on était déjà voisin".

Un dialogue célèbre vient compléter le discours décisif qui précède :

Malouet : Auriez-vous donc le dessein de détruire la noblesse ?

Sieyès : Oui, certainement.

Malouet : Et vos moyens ?

Sieyès : Nous en trouverons ! Ce que nous ne pourrons pas faire, nos successeurs l'exécuteront.

À l'ouverture des États-Généraux, le roi parle du ton hautain traditionnel. Il blâme "l'esprit d'innovation" et déclare que les ordres "supérieurs" sont disposés à accorder au Tiers, à titre d'aumône, l'égalité de l'impôt.

Devant l'hypocrisie, les subterfuges et la morgue menaçante de la camarilla d'Ancien Régime, les chefs du Tiers ripostent par la franchise et la fermeté. De jeunes nobles enthousiastes entraînent les roturiers dans une attitude de vigueur. Le 10 juin, Sieyès déclare : "Coupons le câble, il est temps". Le 17 juin, l'Ordre du Tiers-État se proclame unilatéralement "Assemblée Nationale".

La clique des courtisans fait venir des mercenaires étrangers pour assiéger la jeune Assemblée. Celle-ci, au lieu de céder, se galvanise, déclare "ne pas se croire assez libre pour délibérer". Sous la présidence de Bailly, c'est, le 20 juin, l'historique serment du Jeu de Paume : L'engagement solennel des députés de ne point se séparer avant d'avoir donné une Constitution au pays. Ce coup de force intolérable de la bourgeoisie, qui "somme" les ordres privilégiés de se réunir à son Assemblée et, par suite, d'accréditer la règle irréversible du vote "par tête", déclenche la réaction féodale.

Le 23 juin est le jour de la cruciale Séance Royale, véritable déclaration de guerre à l'Assemblée, face aux défections du bas-clergé et des petits nobles ralliés à la roture. C'est l'habituel double-jeu des réactionnaires incorrigibles. D'abord, le monarque "accorde", "consent" tout ce qu'on veut, et multiplie même "généreusement" les concessions de détail, tous les aménagements possibles portant sur des broutilles, telles les lettres de cachet et la corvée, afin d'en imposer, embrouiller, diviser, et finalement ne rien céder d'essentiel, d'irréversible. Malouet conseille le roi : "Il ne faut pas attendre que les États-Généraux vous ordonnent, il faut vous hâter d'offrir tout ce que de bons esprits peuvent désirer de raisonnable". Et le "souverain" Louis Capet y va de son radotage doucereux : j'ai tout fait "pour le bien de mes peuples" ; aux députés : "je vous ai assemblé.. , je me dois de faire cesser les funestes divisions", etc. Ensuite, ce sont les injonctions insolentes : "le roi veut", "le roi déclare nulles et illégales" les décisions du Tiers-État. Le roi, ayant dénoncé toutes les décisions de l'Assemblée, se déclare seul juge des réformes à opérer ; il maintient expressément "l'institution de l'armée" qui exclue les roturiers des grades. Enfin, le despote ordonne : "je vous ordonne de vous séparer de suite" ; "Si vous m'abandonnez, seul je ferai le bien de mes peuples" ! Pendant ce temps, les fanatiques moyenâgeux, à l'abri des régiments de Sa Majesté, répandent leur bave, accusant les "usurpateurs" roturiers, le "parti démagogue", les "meneurs", les "êtres féroces" et la "vile populace" qui applaudit à chacun des actes des députés populaires. C'est alors que Mirabeau, membre dissident de la noblesse, répond au domestique officiel de l'absolutisme qui prétend disperser l'Assemblée : "Esclave, allez dire à votre maître que nous, députés de la France, nous sommes ici par la volonté du peuple, et que nous n'en sortirons que par la force des baïonnettes".

En quelques semaines, oui, le présage de Sieyès s'est réalisé : le câble est tranché ! Des antiques institutions, Assemblées de "Notables", Ordres du Royaume convoqués en États-Généraux, l'on a basculé soudain dans un nouveau monde : celui d'une Assemblée Nationale résolue à se former en Constituante. "Les" peuples du passé se sont mués en un éclair en une Nation, qui se donnera le cadre qui lui est adéquat, les communes et les départements du système représentatif nouveau.

Un premier enseignement mérite d'être gravé de manière indélébile dans nos mémoires : alors que parmi les Constitutionnels se trouveront des "grands noms" de France : Montmorency, etc. ; parmi les intraitables ennemis de la Nation se verront des plébéiens, tels que l'abbé Maury.

Deuxième remarque capitale : en relevant audacieusement le défi lancé par l'absolutisme décadent, le Tiers-État opère un saut dans l'inconnu. Il n'est pas véritablement conscient qu'il s'expose à avoir contre lui, et une Vendée intérieure, et toute l'Europe semi-féodale ; sans oublier les intrigues redoutables de l'hégémonisme de la libérale "perfide Albion", comptant bien tirer les marrons du feu ! Mais la bourgeoisie moderne française se soucie peu de ces obstacles formidables, et elle fait bien. Chaque chose en son temps ! Forte de son droit historique, elle sent intensément qu'il n'y a plus réellement le choix. Faiblir, ce ne serait que reculer pour mieux sauter. Et elle saura montrer que le mérite est d'autant plus grand que les épreuves sont sévères, qu'il y a une gloire inégalée à se montrer les pionniers universels d'une lutte qui n'est elle-même que nationale.

Notre dernière observation est la suivante : du 5 mai au 20 juin 1789, tout s'est déroulé encore à Versailles, dans l'antre même des courtisans et des laquais. La menace de la garde suisse et autres satellites du despotisme impose désormais aux députés de la Nation de se placer sous la protection populaire, de se transporter à Paris et y appeler à la création d'une "garde bourgeoise". Les déclamations ne sauraient suffire à briser l'arrogance des parasites de l'ancien régime : il avoue ne connaître que la force ? Il va sentir celle des piques des faubourgs !

- 1936 -

Depuis 150 ans, nos historiens décadents, prétendument républicains ou socialistes, tout en faisant la moue quand ils évoquent la monarchie constitutionnelle, ne se lassent pas en sous-main de "déplorer" la révolution, sous couvert d'en dénoncer les "excès". Et nous les voyons rabâcher qu'il est bien triste qu'on n'ait pu "éviter" la tourmente, aux seules fins de discréditer les "grands ancêtres" qu'ils veulent cependant "commémorer" tous les siècles avec des sanglots dans la voix. Cette technique bien au point, dont le but est de démoraliser le peuple qu'ils dominent à leur tour, se joue en nous repassant la même rengaine : Ah ! Si on avait écouté Turgot, au lieu de le "disgracier" en 1776 ; Ah ! Si on avait écouté Necker, au lieu de le "renvoyer" en 1789. Nos despotes démocratiques pensent-ils conjurer ainsi éternellement l'orage communiste qui menace l'ordre présent du capitalisme parasitaire ?

Le Front Populaire occupe une place à part dans le légendaire de la classe salariée : l'écrasante victoire électorale de la Gauche qui obtient la majorité absolue à la Chambre des députés, les Ligues fascistes étouffées, les occupations d'usines bon-enfant, avec orchestres et femmes qui font la popote pour leur Jules faisant la grève sur le tas, les 40 heures et les congés payés, le million de personnes qui défilent de la Bastille à la Nation le 14 juillet 1936, venant acclamer Daladier, Blum et Thorez fichés sur l'estrade. Malheureusement, la réalité est très différente de cette image d'Épinal. Il y a en fait deux Fronts Populaires : d'un côté celui des classes populaires, ayant le salariat à sa tête, de l'autre côté celui des politiciens de Gauche qui se posent en représentants du premier. Un abîme sépare ces deux faces du Front Populaire.

Du côté du peuple, on peut dire que le Front Populaire dure à peine 15 jours : du 26 mai 36, début des occupations d'usines, au 8 juin, date des Accords Matignon.

Les occupations d'usines se développent du 26 mai au 3 juin. Le 5 juin, on compte 500 000 grévistes mais, déjà, de nombreux mouvements du début cessent après la "capitulation des patrons", capitulation obtenue sans la moindre nécessité d'un gouvernement de Gauche - Blum présente son gouvernement le 6 juin - ni par conséquent sans besoin de quelconques Accords Matignon ou de vote consécutif des "lois sociales" par le Parlement.

Le fait essentiel à retenir, c'est que les occupations d'usines furent totalement spontanées. Même la presse de "droite" déclara : "Les communistes ont été dépassés par certains agents syndicaux inférieurs, agent doubles au service de l'Allemagne hitlérienne". En fait, le mouvement spontané des occupations d'usines, commencé chez les "métallos", la fraction la plus représentative du salariat en tant que classe, ce mouvement avait la signification objective de l'aspiration générale au renversement du régime néo-barbare en place, régime du despotisme démocratique et du capitalisme parasitaire. Les occupations d'usines revenaient sur l'opération électorale qui s'était achevée 3 semaines plus tôt, le 3 mai 1936, tenaient cette opération pour nulle, et procédaient à un "second vote", réel celui-là. La voie "constitutionnelle" était tout simplement méprisée, avec ses circonscriptions territoriales et son vote "secret", les élections "à deux tours" et le système des "deux Chambres". Surtout, l'objectif des occupations changeait du tout au tout avec celui des élections. En 1789, l'obsession de la féodalité terrienne était de trouver une issue au Déficit et à la Banqueroute menaçante, en tirant à tout prix des "subsides" de la bourgeoisie, sans qu'il soit porté atteinte au système de la monarchie absolue. En 1936, l'obsession de la féodalité financière était de trouver une issue à la "paralysie des affaires" et à la "fuite des capitaux" menaçante, en relançant à tout prix la machine à produire la rente capitaliste, au moyen d'un New Deal appuyé sur le "syndicalisme organisateur", qui ne touche en rien au système de la République de l'État de Siège consolidée depuis 90 ans (1848). La démagogie politicienne du Front Populaire électoral, pour "le pain, la liberté et la paix", depuis 3 ans déjà Roosevelt s'en était fait une spécialité, dans des discours du genre suivant : "Le rétablissement économique est possible dans la mesure où nous appliquerons des valeurs sociales plus nobles que le simple gain d'argent" (4 mars 1933). Ne nous étonnons donc pas des aveux de Léon Blum, commentant juin 36 dans sa prison dorée de Riom, sous l'Occupation : "Dans le monde patronal on me considérait, on m'attendait, on m'espérait comme un sauveur". Par suite, l'objectif inconscient mais manifeste des occupations, qui était de "changer de régime" et non pas de "changer de majorité", fut-il simplement tué par les Accords Matignon. Ceux-ci ne firent que généraliser et officialiser les "capitulations" spontanées partielles préalables : on se rendait maître du mouvement populaire en le contraignant à se résorber dans une question de satisfactions de simples "doléances" ouvrières, arrêtées selon le "bon plaisir" de sa majesté républicaine.

Du côté de la clique de Gauche au pouvoir, l'opération Front Populaire avait une tout autre signification que pour le salariat ; pour elle, la chose sérieuse était les élections, les occupations étant un simple accident de parcours qu'il fallait savoir gérer adroitement. Les occupations révélaient la nécessité, avec le renversement de l'oligarchie financière, de la refonte du régime politique. La vieille représentation territoriale, sur la base des communes, adaptée au recensement de propriétaires isolés et à l'élection de mandataires de ces censitaires dans un Parlement souverain, ce système était éliminé dans les faits depuis 90 ans. Depuis 1848, le préfet disqualifiait le maire, les régimes policiers spéciaux des grandes villes tournaient en dérision le suffrage universel, et le régime des "décrets-lois" ridiculisait le parlementarisme à l'extrême. L'extrême droite montant à l'assaut du "régime pourri" et de la "république des camarades" manifestait suffisamment le dégoût profond de la singerie démocratique. En tout état de cause, les occupations d'usine et les "comités de front populaire d'usine" qui devaient théoriquement les compléter, révélaient spontanément la nécessité historique d'une nouvelle représentation sociale, basée fondamentalement désormais sur les lieux de travail, ayant un caractère essentiellement collectif et non individuel, et donnant une réalité à l'universalité du suffrage en se délivrant de toute tutelle policière. En perspective, la momie parlementaire devait tomber en poussière par le simple surgissement d'un Congrès national des délégués d'entreprises, lequel devait naturellement s'emparer du pouvoir réel détenu en fait à présent par une aristocratie financière opérant en coulisse.

Il était hors de question que les saltimbanques de Gauche élus en mai 36 tiennent compte de ces tendances sociales pourtant aveuglantes. Le mouvement populaire sombra parce qu'il n'eut pas de chefs à lui. L'action spontanée de masse était plus avancée que ses dirigeants. L'on eut un Front Populaire où des aveugles malfaisants conduisirent des borgnes naïfs. Dans un premier temps, début juin, les pantins signant les Accords Matignon se donnaient à eux-mêmes une autre fessée. En effet, alors que la France officielle continuait de jouer à fond la comédie selon laquelle la population avait une représentation complète dans son personnel constitutionnel parlementaire de députés, sénateurs et autres "élus" des collectivités locales, Matignon faisait sans aucune pudeur l'aveu que toute cette engeance ne représentait rien du tout, par le fait que la crise sociale ne pouvait être traitée que par la voie d'une "grande confrontation" des "forces économiques", patronat et syndicats, au Ministère du Travail, organe de l'Exécutif ! Les historiens dociles de notre néo-barbarie ne font pas mystère de cette incongruité ; ils nous avouent : "En juin 36, les juristes étaient demeurés perplexes devant la nature de l'accord Matignon, qui n'entrait dans aucun des cadres juridiques connus" ! C'est simplement que les magistrats obtus de la décadence moderne n'ont pas pensé à aller consulter les archives de leurs homologues des décadences précédentes, les registres de Vespasien qui rasa Jérusalem (70) ou ceux de Sigismond, l'empereur assassin de Jean Hus (1415).

À Matignon s'assemblèrent donc les représentants de la C.G.P. (Confédération Générale de la Production, patronale) et ceux de la C.G.T. (Confédération Générale du Travail, salariale), sous l'arbitrage gouvernemental du Ministre du Travail. Cette grande confrontation "tripartite" nous replace dans quelque chose d'analogue à la convocation des "trois ordres" d'ancien régime en États-Généraux, le salariat occupant maintenant la place du Tiers-État en 1789. Hélas, en la personne de Léon Jouhaux, chef de la CGT, le salariat a pour le représenter un Necker et non pas un Sieyès capable d'ordonner : "coupons le câble, il est temps !". Et, dans la personne de Maurice Thorez, chef du P.C.F., qui se dit déjà "premier parti de France", la rue n'a, pour crier son aspiration, qu'un "plébéien" du type abbé Maury, et non pas un Mirabeau, capable de dire au chef-flic de Léon Blum : "Esclave, allez dire à votre maître que nous n'évacuerons les entreprises qu'à la force des baïonnettes" ! En 1789, en un mois et demi, "les peuples" du roi s'étaient métamorphosés en une Nation, les États-Généraux se trouvant retournés en Assemblée Nationale. En 1936, la réunion "tripartite" de Matignon ne s'est pas métamorphosée en Assemblée Sociale, le salariat étant persuadé de concentrer les intérêts généraux de la société, et appelant à se joindre à lui les forces saines de l'administration et du patronat qui figurent maintenant le bas-clergé et la petite noblesse.

Pris globalement le Front Populaire représente l'exemple le plus flagrant de notre histoire de République Sociale avortée. Les Rouges de 1848 avaient été vaincus dans l'honneur, de même les Communards de 1871. Le Bloc des Gauches de 1900 et le Cartel des Gauches de 1925, tout comme l'Union de la Gauche de 1981, se réduisent à de répugnantes grandes manœuvres politiciennes. La Résistance, elle, vit d'emblée les "maquisards" s'engager comme supplétifs de la Superpuissance américaine contre la superpuissance allemande, par De Gaulle et Staline interposés. Mai 1968, enfin, ironie de l'histoire, montra la féodalité financière inciter activement les "chefs ouvriers" à se parquer dans les entreprises occupées, afin de prémunir le salariat du "virus" étudiant !

En 1789, la bourgeoisie moderne voulait par-dessus tout la terre, rendue stérile et instrument de génocide, par la domination des ordres privilégiés dégénérés. En 1936, le salariat voulait par-dessus tout entrer en possession des entreprises, du capital productif, rendu stérile et instrument de génocide par la domination des clans irresponsables de technocrates spéculateurs et de bureaucrates prévaricateurs.

Les Accords Matignon et les Lois sociales consécutives réussirent à contenir le salariat dans des "doléances" de mendiants, forçant la masse des exploités et des manuels à se considérer eux-mêmes comme un troupeau voué pour l'éternité à supporter le joug. Le Front Populaire fut l'avortement de la République Sociale, victime de la trahison honteuse de ses chefs. Cet avortement coupait à la racine toute expérience possible d'avoir à relever le défi de l'oligarchie dominante et, par suite, la possibilité pour les classes populaires de s'instruire par le combat de la véritable nature de la mission du salariat. Enfin, cet avortement interdisait toute dissidence éventuelle de fonctionnaires et de directeurs d'entreprises avides d'épouser la cause du salariat, et susceptibles de faire bénéficier ce dernier de leurs capacités intellectuelles et techniques.

À quoi se réduisent donc
les "acquis et conquêtes" de 1936 ?

• Les salariés eurent droit à un "réajustement des salaires, commençant à 15% pour les moins élevés, pour arriver à 7% pour les plus élevés". Avec cela, les "quarante heures" et les "congés payés". Pour le salariat, qui avait avant tout desserré l'étau du despotisme des contremaîtres et des policiers et s'apprêtait à muer cette bouffée d'oxygène en ambiance normale de son existence en se dressant pour s'emparer de la direction sociale, ces soi-disant "conquêtes" consistaient évidemment à lâcher la proie pour l'ombre. D'ailleurs, ces "avantages" étaient du même type que ce que le roi, en 1789, consentait à "offrir" à ses "sujets" dans le cadre des États-Généraux : tandis que l'essentiel, l'absolutisme, restait intangible, la "générosité" du monarque ne portait que sur des concessions annulables le lendemain. C'est ce que les faits montrèrent immédiatement. D'abord la police de Blum intervenait énergiquement pour faire évacuer les îlots de grévistes irréductibles. Ensuite, l'heure était venue où, à son tour, l'oligarchie dominante se mettait à "voter une seconde fois", les bureaucrates gouvernementaux invoquant les "exigences" rigoureuses de la compétitivité internationale, et les technocrates des trusts se retranchant derrière la loi impitoyable du marché du travail. Bref, l'application même des accords ne correspondit en rien à leur rédaction. Des entreprises, supprimant des avantages acquis antérieurement, reprenaient d'une main ce que les "textes" les contraignaient d'accorder de l'autre. L'engagement politique des élus du Front Populaire d'instaurer un impôt progressif fut tout simplement oublié. Enfin, dès septembre 36, Blum procédait à une dévaluation du franc qui tranchait violemment dans les "ajustements" de salaires et d'horaires. Au même moment, le gouvernement décrétait la nécessité de la "Pause" dans l'application du Programme sur lequel il avait été élu ! D'ailleurs, Blum démissionna peu après (juin 37), non sans avoir préparé une 2ème dévaluation qu'appliquera son successeur. En août 1938, Daladier proclama que des "dérogations" aux 40 h étaient nécessaires, et l'on "autorisa" joyeusement les heures supplémentaires pour la Défense nationale, mettant à mal sans aucun scrupule les "lois sociales". Quand un "communiste" comme Marcel Prenant osa dire, à propos des congés payés de 1936 : "pour la première fois, en cet été, les travailleurs allaient pouvoir passer 15 jours au bord de la mer aux frais de leurs patrons", on mesura à quel point le mépris pour le salariat avait pu s'insinuer partout dans notre ordre néo-barbare ! En tout cas, les congés payés, que le dictateur Mussolini avait déjà institué depuis 10 ans, tombaient à pic pour disperser les grévistes et rafraîchir les têtes échauffées par les occupations !

• Du côté des chefs ouvriers, là, on peut en effet parler d'"avancée sociale" : "dans chaque établissement de plus de 10 ouvriers, il est institué deux ou plusieurs délégués", et "la délégation patronale admet l'établissement de contrats collectifs de travail". Ceci, c'est la rémunération spéciale des domestiques de l'oligarchie, étant entendu que "la délégation ouvrière demandera aux travailleurs en grève de décider la reprise du travail". L'on enjoint donc aux chiens d'ouvriers qui ne sont pas au chômage de rentrer à la niche. La bonté princière de l'oligarchie va même jusqu'à l'engagement de ne prendre "aucune sanction pour fait de grève". Comment donc "sanctionner" un pays entier ? Il est facile de renoncer à appliquer ce qu'on n'est nullement en mesure de faire. Et puis, renoncer à punir les grévistes ne leur paie pas leurs journées perdues. Enfin, il sera toujours loisible, plus tard, les choses étant rentrées dans l'ordre, de dégraisser en s'y déclarant contraint par la concurrence, de muter les indésirables ou bien de pousser qui on veut à se mettre dans le cas de "faute grave"...

Faire évacuer les entreprises, revenir à la "normale" concernant le régime du parasitisme et du despotisme, tel était le seul objectif de l'oligarchie. Les chefs ouvriers, nantis de délégations, ne vont pas manquer de zèle pour justifier leur plat de lentilles. Le parti communiste se place à l'avant-garde du mouvement pour régulariser la situation, lui qui a sauté de 10 à 72 députés en mai 1936. Dès le 11 juin, le Bureau politique dénonce les "provocations des éléments troubles qui parlent d'aller jusqu'au bout". Thorez, lui, crache sa parole historique : "il faut savoir terminer un mouvement revendicatif" ; "tout le monde sait que notre but reste invariablement la République des Conseils. Mais ce n'est pas pour ce soir, ça n'est même pas pour demain. Camarades, toutes les conditions ne sont pas réunies. Nous n'avons pas encore derrière nous la population des campagnes. Nous ne jouons pas, nous, avec la classe ouvrière. Les militants du Parti doivent réagir contre les tendances gauchistes. Les camionneurs en grève, c'est le ravitaillement de Paris qui est compromis". Dès ce jour, ces salades de braillard brouillon n'auront plus de cesse. Les crétins de Garnier-Pagès et consorts, du "gouvernement provisoire" de 1848, ayant rempli la fonction qu'on attendait d'eux de torpiller le mouvement populaire, se trouvèrent aussitôt pris d'affolement, sentant qu'ils devenaient de simples hochets encombrants, dépassés par la Société du Dix Décembre préparant l'avènement de "l'homme providentiel", le tyran totalitaire Napoléon III. De même, les gredins communistes de 1936, dès la rentrée des "congés payés", sentirent le sol s'échapper sous leurs pieds, et commencèrent à gesticuler comme des laquais ivres pour persuader la galerie qu'il fallait encore compter avec leurs services. Et Duclos se mit à agiter à la Chambre l'épouvantail de la "carte d'identité fiscale", à y assener que c'en était "assez d'un système dans lequel l'État est pauvre" et autres contes à dormir debout. Quoiqu'il en soit, il fallut que tout le monde avale un chapelet de couleuvres : la "non-intervention" dans la "rébellion franquiste"; entretenir sans fin les salariés des faits divers à propos de "l'unification organique des deux partis" socialiste et communiste ; prier sans succès pour obtenir "la participation communiste au gouvernement" qu'on avait exclue par principe en janvier 36 ; supplier Blum de rester au pouvoir ; dériver du Front Populaire au mot d'ordre d'un "Front des Français" ; drapeau tricolore déployé et Rouget de Lisle statufié ("Unir tous les Français dignes de ce nom", "La France aux Français" - décembre 1937). Mais rien n'y fit, la barque des communistes en peau de lapin prenait l'eau. En matière de "vrais" Français, la Cagoule qui se constituait s'y connaissait mieux que "Momo" (Thorez). La guerre impérialiste s'annonce, dénouement véritable de la crise de 1929, et un nouveau "sauveur", Philippe Pétain, n'est plus loin. En novembre 1938, la grève de la CGT est interdite, le pays mis en état de siège. Cheminots et travailleurs des services publics sont "requis", aux portes des usines, "gardes mobiles" mousqueton au poing "assurent la liberté du travail". Puis on licencie ces mêmes requis et d'autres par centaines de mille et l'on renvoie des dizaines de mille pour fait de grève. En décembre 1938, 430 journaux publient un "appel aux députés" réclamant la dissolution du P.C.F. Le 25 août 1939, enfin, le gouvernement de Front Populaire décrète l'interdiction de l'Humanité ; le 26 septembre 1939, c'est le décret de dissolution du Parti Communiste, la CGT "réunifiée" à son de trompe cinq ans plus tôt (1934) expulse tous ses éléments communistes. Il était bien loin le grandiloquent "Serment du Front Populaire" du 14 juillet 1935. Et le radical Daladier, qui avait peu avant (25 juin) déclaré publiquement sa "haine des 200 familles qui asservissent la France", devait bien se rire des clowns "communistes" bien payés de leur nullité tonitruante et de leur veulerie arrogante.

Quelques enseignements décisifs
ressortent des événements du Front Populaire :

1- Un point de toute première importance, qui est systématiquement éliminé des histoires "ouvrières", c'est qu'en 1936 la France possède le deuxième empire colonial du monde. Or, ceci est le dernier des soucis des apologistes de Juin 36, de ceux qui se pâment à propos des congés payés et s'émeuvent benoîtement de ce que les "prolétaires" bambochent dans les guinguettes. En 1924, le califat politique ottoman, qui survivait nominalement depuis 1840, est aboli. Le lendemain de cet événement clarificateur, le cheikh Ben Badis lance le mouvement réformateur algérien qui va faire flamber la conscience nationale. Cela débouche, en 1931, sur la création historique de l'association des Oulémas qui mène une lutte acharnée contre les marabouts et lance le mot d'ordre qui électrise le peuple définitivement : "L'Islam est ma religion, l'arabe est ma langue, l'Algérie est ma patrie". Le mouvement, précisément, culmine avec la tenue du Congrès musulman du 7 juin 1936. Ces faits ne tiennent aucune place, évidemment, dans la harangue des Jouhaux et Thorez. En réponse à la fermentation anti-coloniale, le projet "Blum-Violette" réussit seulement à briser le mouvement des Oulémas, à tuer le Congrès, en appelant une fraction du mouvement à venir faire procession à Paris derrière leurs protecteurs "intellectomanes-politiciens" (Malek Bennabi).

2- Le deuxième point, capital, à souligner, c'est que les hagiographes patentés du "mouvement ouvrier" se gardent soigneusement de pénétrer dans l'arrière-cour du Front Populaire, de nous décrire l'état de l'Armée, métropolitaine ou coloniale, de ces légions intouchables "en réserve de la République". Qui sait que Pétain était le chef d'État-major du gouvernement du Front Populaire ?

3- Les filous de la "démocratie" n'hésitent pas, périodiquement, à "inaugurer religieusement les chrysanthèmes" de 1789, aux seules fins de couvrir leur propre lâcheté et de brouiller les cartes. Le modèle, en ce genre de malversations historiques, nous est donné depuis 60 ans par le P.C.F. Il ne faisait, d'ailleurs, que reprendre la tradition de fraudeurs de la S.F.I.O. (socialiste), lesquels succédaient aux charlatans de la "république radicale". La manœuvre est la suivante :

- On fait une surenchère éhontée dans la guimauve "tricolore", Jeanne d'Arc et la Marseillaise ficelées ensemble ;

- Et on se veut simultanément, plus "durs" que Robespierre, apologistes de Jacques Roux et Hébert, de purs "enragés"... doctrinaux !

Sortons enfin de cette ornière où l'on joue sur les deux tableaux du réformisme réactionnaire et du révolutionnarisme tout autant réactionnaire ! Notre tâche est beaucoup plus simple et plus nette : c'est de faire autre chose que les Constituants de 1789, de la même façon que ces derniers ; c'est d'imiter en social ce que Sieyès pratiqua en politique.

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Dissidence Civique !

"La vérité est toujours bonne à dire".

(auteur : l'élite populaire)

1. Notre société est celle du mépris et du mensonge. Voilà comment la minorité dominante officielle traite l'immense majorité réelle qui se nomme le peuple.

Pourquoi la Constitution de la République peut-elle donc déclarer impunément que "son principe est : gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple" ?

 

2. Le peuple en question va-t-il enfin cesser de consentir à se faire le jouet alternatif de clans rivaux de despotes parasitaires ? Il n'est pas, en effet, d'autre cause aux maux qui le frappent. Tant il est vrai que les hommes ne vivent jamais que sous le régime qu'ils méritent. Hier nous étions les jouets des gangs de droite ou de "gauche", demain nous le serons de bandits "démocrates" ou fascistes.

Ce jeu sinistre n'aura-t-il donc pas de fin ?

 

3. Notre régime du mépris et du mensonge à l'égard du peuple, en vérité de Nouvelle Barbarie, ce système se maintient, il est vrai ! Il dure, d'abord par l'impuissance spontanée que les simples nécessités économiques imposent aux classes populaires. Il dure ensuite par la crainte que répand la menace de répression politique. Mais le besoin et la contrainte, la faim et la peur, s'ils expliquent le maintien du régime, ne sauront jamais justifier son existence.

En tout cas, la condition d'humiliation et d'insécurité qui est faite au peuple condamne absolument ceux qui s'en prétendent les guides et les chefs.

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4. Dans les circonstances présentes, les "candidats" qui se présentent aux suffrages du peuple, tous les candidats sans exception, nous les tenons non seulement pour méprisables, mais encore pour un réel danger public.

Pourquoi cela ? Essentiellement parce que ces candidatures autorisées sont néfastes, en tant précisément qu'elles accréditent l'idée que l'institution d'un véritable "suffrage universel", exprimant réellement la "volonté générale", existe dans notre pays.

Or ceci est une immense et honteuse supercherie contre laquelle nous nous élevons. Et les candidats qui contribuent, consciemment ou non, à entretenir cette illusion anti-populaire commettent un véritable crime moral.

 

5. La supercherie "démocratique" actuelle crève les yeux si on y regarde d'un peu plus près. Comment donc ! Où est la volonté générale du peuple issue des scrutins actuels ?

Nous affirmons que les intérêts du peuple, salariés en tête, eux, sont fondamentalement communs. Nous sommes persuadés que des idées convergentes peuvent et doivent découler de cette communauté d'intérêts. Nous savons que la coïncidence des besoins et opinions du peuple amène inévitablement la découverte de la toute-puissance populaire, et la manifestation d'un enthousiasme durable correspondant.

Pourquoi donc le "verdict des urnes" et ses suites engendrent-ils systématiquement tout le contraire : la division, le désarroi, le désarmement et le découragement aggravés du peuple ?

 

6. Le crime légal qui consiste à cautionner la tromperie infâme de la démocratie actuelle, au travers des candidatures autorisées, se prouve sans peine. Il ressort des effets profonds du système en place.

En premier lieu, du côté du peuple, en le conduisant progressivement à s'enfoncer dans la plus sombre démoralisation, on le pousse du même coup à se laisser emporter, un jour ou l'autre, par une rage désespérée et destructrice. Alors, sans l'avoir voulu, le peuple provoque un état d'anarchie sans véritable perspective ni issue.

En second lieu, du côté de la coterie néo-barbare dirigeante, celle-ci est coupable du forfait qui consiste à avoir progressivement suscité le discrédit total, dans les rangs du peuple, à l'égard du principe électoral et représentatif. Elle a ainsi travaillé obstinément à la ruine du meilleur héritage politique civilisé. Or, quand se déclenche l'inévitable soulèvement populaire sauvage, la clique dominante se prévaut alors, sans le moindre scrupule, du discrédit général de la démocratie, pour mettre en action la répression la plus brutale et la persécution la plus haineuse contre les meilleurs enfants du peuple. Ces derniers sont en effet alors désignés comme boucs-émissaires du chaos, sous les noms d'oiseaux habituels : agitateurs, etc. Bref, les brigands gouvernementaux établissent à ce moment la dictature, en jurant comme le diable y avoir été forcés.

Comment, après cela, éviter de reconnaître que les "candidats" actuels sont tous, à un degré ou un autre, de mauvais bergers politiques du peuple, et que leur action se conjugue, de fait, avec celle d'autres loups ravisseurs économiques du peuple ?

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7. Reste que la perversité de la fausse démocratie établie actuellement est un mystère qu'il est absolument vital de percer. L'affaire se tranche en quelques mots.

C'est le premier dictateur européen de l'époque contemporaine, notre premier Président de la République devenu ensuite Napoléon III, qui nous a "accordé" le suffrage universel que nous connaissons. Or, pour commencer, la sagesse veut qu'on ne possède vraiment que ce qu'on conquiert soi-même, et non point du tout ce qui nous est "octroyé".

Mais c'est la question du contenu réel du "doit de vote" qui clôt définitivement le débat. Ce fameux doit nous fut concédé dans le cadre de l'instauration simultanée de l'État policier. Cela seul éclaire toute l'affaire. En résumé, l'opération se réduisit à la manipulation diabolique suivante l'ombre de la citoyenneté politique fut abandonnée au peuple, en échange de l'abandon qu'on lui imposait de la véritable proie : le libre exercice de l'association civile. En même temps en effet, on proscrivait absolument l'association libre, en plaçant toute organisation populaire sous la coupe du préfet et du commissaire de la République. Toute association populaire libre se trouvait désormais suspectée a priori d'être une "société secrète", pour reprendre la langage de la démagogie officielle. Bien sûr, des clubs de vieilles dames pour jouer au bridge en mangeant des gâteaux pouvaient toujours se constituer librement !

Signalons pour mémoire un point qui n'est pas sans intérêt : le suffrage était gracieusement offert au peuple, en même temps qu'on légalisait la forme juridique irresponsable de l'entreprise : la Société Anonyme...

 

8. Il est simplement fou de croire que la loi ultérieure de 1884, qui autorise la "libre constitution des syndicats", fut un coup porté au nouveau système de démocratie dictatoriale. Le dépôt obligatoire des statuts et des noms des dirigeants, mis à jour, à la Préfecture de police, et la prison prévue pour quiconque "porterait atteinte au libre exercice de l'industrie et du travail", tout cela prouve surabondamment qu'il ne s'agissait au contraire que d'une simple sophistication du système de l'association préfectoralisée. Le perfectionnement continu du régime qui tient le "peuple-citoyen" pour intrinsèquement délinquant, c'est pourtant ce que des tas de gogos et de filous nous chantent comme des "acquis sociaux" '. Notons que la prétendue "conquête" du droit syndical était décrétée sous le règne de "Ferry-le-tonkinois" ; les victimes de la ruée coloniale de l'époque n'ont pas manqué de juger la plaisanterie macabre…

 

9. Au fond la "ruse" diabolique du suffrage universel de la démocratie dictatoriale est on ne peut plus grossière. D'abord, on institue la prefectoralisation de la liberté civile. Dans la foulée, on soudoie les éléments les plus vénaux et éhontés du peuple ; on trouve toujours de tels personnages, sélectionnés à rebours, qui sont effectivement "candidats" à la gestion du système de la décadence civilisée.

Alors le panorama social se présente de la façon suivante : d'une part, la citoyenneté libérale antérieure, telle que l'entendaient le citoyens déclarés "actifs" (les propriétaires "censitaires"), cette citoyenneté réelle se trouve à présent dépouillée de ses attributs essentiels : la garde nationale (le droit de porter des armes), le jury (le droit d'être jugé par ses pairs) et les clubs (la liberté des assemblées populaires permanentes). D'autre part, on peut proclamer maintenant sans danger un "suffrage universel" qui se contente de ravaler la masse de la population au rang de citoyens "passifs" à perpétuité, petits propriétaires y compris !

Le rôle attendu des gens du peuple, promus miraculeusement "citoyens", est alors d'être appelés périodiquement à plébisciter la bande de tyrans au pouvoir. Ces derniers n'hésitent d'ailleurs pas à se déclarer de la manière la plus officielle comme absolument "irresponsables" vis-à-vis des pseudo-commetants que nous sommes. On dit que cette irresponsabilité est la rançon nécessaire de tout État "moderne", qui ne peut se passer d'un "pouvoir fort" !

En définitive, tels un troupeau de masochistes, il nous faut donc à présent venir applaudir cérémonialement nos propres oppresseurs, à l'occasion de chaque parade électorale planifiée. C'est ce qui nous fit tomber jusqu'à l'état présent d'avilissement civique : celui d'une masse d'"indigènes" simplement "sondés". À ce titre, nous jouissons du grand privilège de pouvoir "donner notre avis" à propos des luttes de clans qui agitent les extra-terrestres gouvernementaux.

Reste une dernière "conquête" démocratique à espérer, selon le modèle belge, grec, ou turc : obtenir que la contrainte légal menace ceux qui cherchent à échapper au devoir d'immolation morale, incarné par la participation aux "consultations électorales", avec un barème d'amendes à l'appui !

 

10. Nous sommes nous bien faits comprendre ?

La tâche présente n'est pas d'utiliser d'une manière ou d'une autre, en faveur de monsieur Machin ou de madame Chose, un "droit de vote" qu'en fait nous n'avons pas. La tâche est au contraire de conquérir ce droit réel, la liberté effective et non illusoire d'exprimer et de faire appliquer notre volonté populaire. Cette volonté du peuple, les maîtres de la démocratie fictive actuelle s'en fichent comme de l'an 40 !

Qui oserait défendre l'absurdité selon laquelle la "voix" d'un clochard pèse autant dans l'État que celle d'un patron d'une multinationale !

Mais il y a plus grave. Certains se gargarisent comme des abrutis, du fait que nous autres, contrairement à de malheureux étrangers, nous devons nous féliciter de l'avantage insigne "d'être en démocratie", de connaître le "pluralisme", et d'autres choses de la même farine. Cela prouve, non pas le "haut degré de développement politique" de notre pays, mais seulement le lamentable bas niveau de conscience sociale des serins ou malandrins qui tiennent ce langage.

Notre peuple, il est vrai, s'est fait corriger comme un enfant dévoyé chaque fois qu'il fit mine de s'engager dans la voie de la démocratie sociale. Ces défaites appartiennent indiscutablement à notre tradition sacrée. Mais regardons les choses en face : la cause de la citoyenneté sociale n'a connu jusqu'à présent que des défaites !

Pourquoi cela ? Parce que notre peuple a toujours fini par se laisser submerger par l'esprit servile du "petit blanc chauvin", ayant le malheur d'appartenir passagèrement à une Puissance mondiale, militariste et colonialiste. En d'autres termes, notre peuple s'est trouvé privé jusqu'à présent d'une émancipation sociale qui lui était nécessaire, mais qu'il n'a pas su encore mériter.

Pourtant, notre propre abaissement nous a fait un tort incalculable. Et pensons-y : le tort immédiat que nous nous sommes faits à nous-mêmes, par notre immaturité historique, est inséparable du tort direct consécutif que nous avons fait, d'un côté à nos "ennemis héréditaires" successifs d'Europe : de l'autre côté à la "francophonie" du tiers monde colonisé. Au bout du compte, notre propre nullité a lésé gravement l'ensemble des sections de peuple mondial unique, dont nous sommes partie prenante.

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11. Résumons-nous :

a) Le système électoral/parlementaire authentique, la citoyenneté "active" d'autrefois, cela n'a jamais été que l'instrument spécifique de la bourgeoisie civilisatrice dominante, du temps de la monarchie constitutionnelle d'avant 1850. Les classes populaires, manuels et exploités, n'ont jamais joui de cette démocratie qu'indirectement. Mais outre l'avantage indirect que le peuple retirait du régime libéral bourgeois, ce régime avait de plus le mérite de la franchise : c'est officiellement et sans complexe qu'on nous reléguait alors parmi la masse des citoyens "passifs".

b) Depuis 150 ans, la féodalité financière s'est substituée à la bourgeoisie libérale comme puissance dominante. Sa première opération a été de saborder et enterrer le régime politique antérieur de démocratie parlementaire. Cette opération fut précisément solidaire de la proclamation de la fiction juridique du "suffrage universel" ; et elle ne fut en fait possible que par ce tour de passe-passe.

Depuis lors, la masse de la population est réduite au statut d'une masse indigène, parquée "nationalement", confinée au rôle pervers de citoyens "passifs". En effet, du même coup, la qualité de citoyen "actif fut interdite à qui que ce soit. Il n'y eut droit de cité que pour le seul arbitraire de faux représentants du peuple, et vrais colons oppresseurs, essentiellement irresponsables, mais ayant en outre le culot de vouloir qu'on les plébiscite régulièrement ! C'était l'avènement du régime que nous connaissons, et qu'il faut bien appeler par son nom : la démocratie dictatoriale, ou République despotique.

c) Le peuple a le devoir de se proclamer l'héritier légitime du principe électoral et représentatif, qui est le "clou" de l'évolution politique civilisée. Le peuple se doit de placer ce principe démocratique authentique sous sa protection spéciale et indéfectible, étant seul à y être attaché. Peu importe qu'il n'ait encore jamais pu appliquer ce principe pour son propre compte. Peu importe l'usage perfide et insultant qui est fait de la démocratie dans l'État policier actuel.

d) Nous renvoyons dos-à-dos tous les partis et syndicats rivaux, quels qu'ils soient, dans la mesure où ils prêtent tous leurs concours à la perpétuation de la supercherie électorale et "démocratique" actuelle. Nous mettons en demeure les dirigeants de ces organisations, assermentées de fait au régime, de se prononcer publiquement et catégoriquement, vis-à-vis de leurs militants et sympathisants de bonne foi, sur ce sujet du système de démocratie dictatoriale qui est le nôtre.

e) Nous exigeons, par voie d'une Pétition générale de la part des Officiels de la République despotique, qu'ils procèdent à une première réparation morale, sous forme d'un remboursement de tous les frais parasitaires qu'entraîne la comédie électorale ; ce gaspillage de monarques décadents n'a d'autre effet que d'aggraver encore la charge ordinaire supportée par le peuple.

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12Décisions pratiques :

a) Face au système de démocratie dictatoriale en place, nous nous déclarons solennellement en Dissidence civique organisée. Ceci est évidemment tout le contraire d'une démarche "abstentionniste". C'est purement et simplement obéir au devoir essentiel de la Citoyenneté Sociale, comprise au sens populaire.

b) Nous déclarons de salut public, que les vils "sondés" que nous étions jusqu'à ce jour, se constituent en Comités de Dissidence civique permanents, à établir prioritairement dans les entreprises, et appelés à se confédérer. Ces Comités doivent s'engager à donner l'exemple nouveau du respect des suffrages en leur sein. Les membres qui se verront portés à un poste de direction doivent engager et démontrer leur responsabilité dans l'accomplissement de leur fonction.

c) Le mouvement des comités de dissidence civique a pour but naturel la convocation d'un Congrès général des délégués des comités.

Le Congrès ne peut évidemment avoir d'autre mandat que celui de faire triompher la citoyenneté active du peuple dans l'État, autrement dit de ménager l'avènement d'une République Sociale. Un tel événement marquera bien sûr un tournant de l'histoire européenne, et même de l'histoire occidentale et mondiale.

L'affirmation de la citoyenneté sociale, qui passe nécessairement par la dissidence civique se veut foncièrement pacifique. Elle restreint d'ailleurs son objet immédiat à une seule insurrection spirituelle et morale déclarée, contre la prostration populaire que provoque le régime de la démocratie dictatoriale.

Il n'appartient qu'au peuple, ultérieurement constitué en Assemblée Sociale constituante, de tirer toutes les conséquences, économiques, scientifiques et autres, de la conquête de la citoyenneté sociale. Les questions de "programme politique" au sens étroit, c'est-à-dire de "propositions alternatives" portant sur la gestion matérielle de la société (questions que chacun peut et doit creuser dans toutes les directions), ne peuvent en aucun cas être prises en compte pour l'appartenance au mouvement de dissidence civique, et porter atteinte à son union. Dans les conditions présentes, faire valoir des divergences déplacées à ce propos, prendrait nécessairement le caractère d'une diversion tortueuse et malsaine, ce serait une source de division mortelle pour la cause de la Citoyenneté Sociale.

d) Il est de notre devoir d'alerter tous ceux qui se proposeront comme missionnaires de la cause de la Citoyenneté Sociale. La libre association civile qu'il s'agit d'imposer coûte que coûte, en face du suffrage politique frauduleux, cette action arrache obligatoirement le masque de la démocratie dictatoriale.

Point d'illusions donc : les voyous qui dominent l'État policier actuel ne peuvent voir dans notre entreprise que le projet de constituer un association à "objet illicite", un "attentat" prémédité contre la "légalité républicaine", visant à "changer le régime constitutionnel". Évidemment, leur régime de despotisme parasitaire est en jeu ! Et ils font ainsi par avance l'aveu, dans leur Code Pénal, qu'ils envisagent tout germe de libre association populaire comme la catastrophe sociale suprême.

La cause de la Citoyenneté Sociale victorieuse est ce qui peut seul nous préserver des drames menaçants de l'anarchie et de la dictature, qui s'engendrent l'une l'autre. Notre cause s'expose pourtant directement à subir la répression des corps de guerre civile existants, dénommés C.R.S. et gendarmes mobiles. Par-dessus le marché, une épée de Damoclès est suspendue au-dessus de la tête du peuple : c'est l'intervention ultime des corps de tueurs professionnels, dénommés "troupes d'élite" : parachutistes et légionnaires.

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13. Nous savons très bien que nos avertissements nous ferons traiter de prophètes de malheur. Hélas ! la peur n'évite pas le danger. Et c'est bel et bien à s'imposer des sacrifices qu'il faut nous préparer. Qu'on le veuille ou non, la question cruciale reste pendante : acceptons-nous, oui ou non, l'état de déchéance du peuple qu'impose la démocratie dictatoriale ? Voulons-nous, oui ou non, abattre enfin ce régime, le plus tôt possible étant le mieux, c'est-à-dire œuvrer à l'avènement libérateur de la démocratie sociale ?

Quand les classes populaires manifestent leur mécontentement, les aigrefins gouvernementaux et autres le prennent aussitôt de haut et répliquent : de quoi vous plaignez-vous donc ? N'avez-vous pas vous-mêmes légitimé l'état de chose contre lequel vous prétendez protester à présent ? Est-ce que la "majorité de la nation" n'en a pas décidé ainsi aux élections ? Est-ce donc le désordre que vous cherchez ? Que répondre à cela ? Une seule chose raisonnable : menteurs insolents ! nous n'avons jamais pu vraiment nous éclairer mutuellement, ni pu arrêter effectivement notre volonté générale, ni pu sélectionner d'authentiques représentants, ni pu réellement sanctionner ceux qui se seraient montrés défaillants dans la mission que nous leur aurions confié ! C'est pourquoi nous nous rallions désormais au mouvement de dissidence civique pour la citoyenneté sociale !

Autre chose : combien eûmes-nous, depuis 150 ans, de candidats de "l'espoir" qui devinrent peu après les représentants de la désillusion intégrale ? Mais à qui doit-on s'en prendre finalement ? À nous-mêmes et à personne d'autre ! La faute fondamentale est d'avoir endossé notre statut imposé de citoyen passifs, et cela jusqu'au point de pratiquer le culte superstitieux des urnes préfectoralisées. Pourtant, comment pouvions-nous croire un seul instant que le bulletin de vote avait pour fonction celle de la lettre que les enfants déposent dans leurs souliers et qui, de là, arrive sous les yeux du père Noël, lequel s'empresse aussitôt de délester sa hotte de cadeaux comblant nos vœux ! Ce qui est naïveté charmante chez un bambin, devient bigoterie ridicule chez un électeur salarié adulte. Est-il souhaitable qu'il s'entête dans sa crédulité, et en vienne à imaginer que son malheur est mérité, que le père Noël "n'est pas passé" parce qu'il n'a pas été sage ! Un citoyen actif véritable, un salarié conscient en premier lieu, est aussi un vrai croyant ; son précepte est : "Aides-toi, le Ciel t'aidera !".

II nous semble bon de conclure en rappelant une parole, prononcée il y a longtemps, à l'autre bout du monde, par un grand ami du peuple : "Chassez vos illusions, et préparez-vous à la lutte !" (Mao Tse-Toung).

 

Citoyenneté Sociale !

Extrait de "L'Indigène et le Plébicite"
de l'Église Réaliste - 1995

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La Société du
Code Pénal

Extrait de "L'Indigène et le Plébicite"
de l'Église Réaliste - 1995

Depuis 150 ans, les salariés et le peuple sont soumis au régime politique du despotisme "démocratique". Dans les faits, c'est le régime des Devoirs de l'homme substitué à celui des Droits de l'homme. Sur le plan du droit positif cela se traduit par la primauté effective du Code Pénal sur le Code Civil. La règle pratique n'est plus "tout ce qui n'est pas interdit est autorisé" mais, à l'inverse, "tout ce qui n'est pas autorisé est interdit". Seulement, nos juristes obtus et vicieux n'ont même pas la pudeur de refondre et simplifier tous les textes officiels, en prenant en compte ce retournement de toute la tradition civilisée dans le sens néobarbare, qui caractérise l'état de choses actuel.

LIBERTÉ

"On est quand même en démocratie, on a le droit de s'exprimer", etc. ; c'est ce que chantent quelques naïfs inoffensifs, qui reprennent le refrain lancé par d'autres roublards redoutables. La seule chose sensée à tirer de ces insanités, c'est que le despotisme démocratique se soutient fondamentalement de luimême jusqu'à ce qu'il craque, et que le peuple est endormi jusqu'à ce qu'il s'éveille.

Effectivement, le système en place du capitalisme parasitaire maintient spontanément le peuple dans un état d'humiliation et d'insécurité qui l'enferme dans l'impuissance et la désillusion. Fautil pour autant idéaliser un tel ordre social lamentable ? Bredouiller "on est quand même en démocratie" ne peut signifier que deux choses : primo, "ça pourrait être pire", donc je choisis de me taire et je suis fier d'être un lâche ; secundo, "ça ne pourrait guère être mieux", donc je n'ai rien à dire, et je me vante d'être un abruti. Moralité à quatre sous : quel bonheur de ne pas se compter dans les "exclus" qui dorment dans les gares, ou parmi les "inclus" hébergés dans les prisons-Bouygues !

Ce qu'il y a de plus sérieux, c'est que le despotisme démocratique mène inéluctablement à une situation d'avantguerre ou une situation prérévolutionnaire où l'atmosphère "d'Union Sacrée" aidant alors, il sera réellement question à ce moment d'instaurer un "régime spécial de restriction des libertés", prévu dans le Code. Ce jourlà, il y en aura toujours qui changeront de disque et viendront nous chanter "tout va très bien madame la marquise, soyons contents de rester entiers, d'autres se font trouer la peau".

Notre fameuse liberté, c'est donc celle de ne pas broncher, et elle est consignée dans le Code Pénal. N'oublions pas cependant que le Code du Travail et le Droit Administratif confortent gaillardement le despotisme démocratique.

LUMIÈRES

Les lumières, c'estàdire ce qui a vocation de former et informer nos petites têtes, c'est l'École et la Presse qui en revendiquent le privilège. Qu'estce que ça donne dans notre démocratie dictatoriale ? Étant entendu que ce que l'on désigne traditionnellement sous le nom de "presse" comprend de nos jours l'ensemble des "média", télé en tête, dans l'état actuel, le couple École  Presse n'a qu'une fonction : le viol des foules comme organe des ténèbres.

École

L'école présente est essentiellement une institution disciplinaire. La première discipline enseignée est "savoir se vendre", la servilité et la duplicité. Pour remplir cette mission, l'école se fait le lieu où l'instruction tue l'intelligence ; elle se glorifie de se restreindre rigoureusement aux opérations de gavage, en vue du "diplôme". C'est l'horrible "laïcité" qui signifie : dans nos murs, toute question de spiritualité, d'idéal, est interdite. L'école est donc un double de la "Grande Muette", "neutre" comme la caserne vis-à-vis de toute pensée vivante authentique. C'est ce qui fait de l'école caporalisée un royaume "austère", répulsif et fatiguant.

Presse

Heureusement existe l'autre foyer de lumière obscurantiste, presse et télé, royaume compensateur du "licencieux", attractif et prodigue d'évasion.

Les Médias actuels sont essentiellement prostitués. C'est l'horrible "liberté" de l'information. D'abord, c'est le déluge "distrayant" de faits divers, chiens écrasés, incidents biographiques de "vedettes" en tous genres ; ceci enchaîne avec les "variétés", où le porno alterne avec Cendrillon et les gangsters avec Zorro ; le clou du délassement est cependant avec le Mondial et la Roue de la Fortune. Mais c'est la fonction de manipulation idéologique qui est la mission fondamentale des média : au travers du flot intarissable des commérages de politicaillerie, il s'agit à la fois d'engluer la "masse" dans des considérations qui ne la concernent nullement, et de l'amener à "prendre parti" dans la guerre des gangs dominants. Diviser pour régner ! Diversion c'est domination !

ASSOCIATION

Les conditions matérielles d'insécurité et d'humiliation qui sont faites au peuple dans le cadre actuel néobarbare, ces conditions suffisent à paralyser à la base tout "droit" éventuel du peuple. Les conditions intellectuelles de ce même ordre, Presse vendue et École imbécile, ces conditions organisent le dévoiement de tout "droit" éventuel du peuple.

Resterait la seule issue de l'Association : c'estàdire que les personnes du peuple ellesmêmes, quoique dépourvues de temps, de culture et d'argent, fassent jouer le génie collectif pour faire percer quelque chose ressemblant à un "droit" du peuple. Mais c'est là que les choses deviennent sérieuses, ce que les tyrans "républicains" qui tiennent les commandes craignent comme la peste, ce qui les conduit à rappeler brutalement le peuple à ses "devoirs", en soumettant le droit d'association aux conditions juridiques qui sont celles de l'État policier.

Mais le despotisme démocratique réussit ce tour de force qui consiste à nommer "droits" ce qu'il impose comme "devoirs" et, finalement, à n'avoir à montrer sa force que pour ne pas s'en servir car non seulement il autorise, mais encourage même toutes les associations possibles et imaginables, à la seule mais décisive condition qu'elles rendent un hommage préalable au Code Pénal. De telles associations, a priori "assermentées" au régime, peuvent alors fleurir à volonté : syndicats, partis, organisations humanitaires, etc. Il n'y a de limite à la débauche associative que le montant des subventions officielles et des dons de gens "qui comptent", à se partager avec, à la clef, les sinécures de "permanents" et autres "planques" que procurent les "relations". Dans ces conditions, l'association jugée dangereuse dans l'absolu, devient très avantageuse au despotisme démocratique : d'abord, s'agitant pour ne pas agir, s'adonnant à des simagrées qui "animent" l'ordre décadent, elle occupe le terrain social et représente un réseau de "kapos" dans la masse, qui donnent à chaque instant le niveau de la "température" qui y règne à la Préfecture de police ; ensuite, par la foire d'empoigne que l'association assermentée organise pour les postes de porteserviette et les livrées de laquais, la masse harcelée pour payer son timbre par des sectes concurrentes qui promettent de la "défendre", se voit solidement rivée dans son impuissance.

Réunion

La forme la plus élémentaire de l'association est la réunion. Le Code Pénal veille tout particulièrement à faire la chasse à ce qu'il nomme "réunion illicite", "réunion séditieuse". On nous dit : "Les réunions publiques sont libres sous conditions : les clubs interdits ; les réunions ne peuvent être tenues sur la voie publique. Réunions électorales : ne peuvent y assister que les électeurs de la circonscription ; elles ne peuvent se prolonger que jusqu'à l'heure fixée pour la fermeture des établissements publics. Chaque réunion doit avoir un bureau composé de trois personnes, responsables des infractions aux prescriptions suivantes : interdire tout discours contraire à l'ordre public. Un fonctionnaire de l'ordre administratif ou judiciaire peut être délégué par le préfet pour assister à la réunion : il choisit sa place. Est qualifié de "complot contre l'autorité de l'État, l'attentat dont le but aura été de changer le régime constitutionnel ; il y a complot dès que la résolution d'agir est concertée entre deux (!) personnes". "Seront dissoutes toutes les associations qui auraient pour but d'attenter par la force à la forme républicaine de gouvernement, ou de faire échec au rétablissement de la légalité républicaine". "Cris et chants séditieux proférés dans les lieux de réunion publics seront punis". "Seront punies comme réunions de rebelles celles formées sans armes et accompagnées de menaces contre l'autorité administrative ou contre la force publique". "Porter atteinte à l'autorité de la justice ou à son indépendance sera puni", "L'association de malfaiteurs est l'entente établie dans le but de préparer des crimes contre les personnes ou les propriétés, quelle que soit la durée ou le nombre de l'association, et cette entente n'exige pas le dessein spécialement formé de commettre un crime (!)".

Est attentat la "Coalition de fonctionnaires concertant des mesures contre l'exécution des lois ou contre les ordres du gouvernement ; les fonctionnaires qui auront arrêté de donner des démissions dont l'objet serait d'empêcher l'accomplissement d'un service, seront coupables de forfaiture". La "démoralisation de l'armée est atteinte à la défense nationale".

Manifestation

Sont soumis à "obligation d'une déclaration préalable tous cortèges, défilés, rassemblements ; la déclaration indique le but de la manifestation, le lieu, la date, l'heure, l'itinéraire. Si l'autorité estime que la manifestation est de nature à troubler l'ordre public, elle l'interdit". "Sera punie toute provocation à un attroupement non armé, soit par discours, soit par écrits". "Est interdit sur la voie publique ou dans un lieu public tout attroupement non armé qui pourrait troubler la tranquillité publique". Sera puni qui "provoque à un rassemblement ayant pour objet la remise de pétitions aux assemblées parlementaires". Est punie la "résistance, désobéissance ou autre manquements (!) envers l'autorité publique". Il y a "crime de résistance envers la force publique" à "détourner les militaires de leurs devoirs et de l'obéissance qu'ils doivent à leurs chefs". Il y a "crime de mouvement insurrectionnel : aider à faire des barricades, empêcher la réunion de la force publique, désarmement de la force publique."

EXPRESSION

Le peuple étant privé de liberté et de lumières, l'association qui pourrait y remédier, si elle ne travaille pas à consolider le despotisme démocratique, étant immédiatement qualifiée d'association de malfaiteurs, "société secrète", "menées anarchistes à réprimer", le régime arrive à son but. Il se glorifie alors de ce que le cher monde libre accorde à tous le "droit d'expression". Or, non seulement le système fait en sorte que nulle parole ne puisse se traduire en action mais "l'expression" même est conduite à se renfermer dans la pure liberté de conscience muette, qu'il n'est au pouvoir d'aucune dictature d'interdire ! La pensée purement passive et personnelle, dès qu'elle tente de devenir active et collective, doit prendre les formes perverses prévues par le régime.

L'Homme

L'individu privé, isolé, se trouve contraint à l'autocensure. Si sa pensée secrète contient un mécontentement, s'il s'aventure à "exprimer" effectivement ce dernier, il tombe immédiatement sous le coup : s'il s'agit de particuliers, de "diffamation" ou "injure" et, s'il s'agit de l'autorité publique "d'outrage". L'auteur d'outrages envers les dépositaires de l'autorité et de la force publique, par paroles, gestes (!!), écrits ou dessins, non rendus publics (!!), visant tout officier ministériel ou agent de la force publique, sera puni". Tout ceci ne peut évidemment que pousser à bout le pauvre particulier, à l'engager dans les "voies de fait" et se voir traiter de "forcené".

Le Citoyen

Le même individu absolument isolé se trouve appelé à faire "acte de citoyen" dans le "secret de l'isoloir", non plus contraint à l'autocensure cette fois, mais en pouvant se féliciter maintenant de pouvoir plébisciter le système de façon "franche et massive" ! S'il se trouve mécontent ensuite, n'est-ce pas lui qui est censé l'avoir voulu ! D'ailleurs, l'affichage tombe immédiatement sous le coup de "dégradation de monuments"; il est "interdit de distribuer des documents le jour du scrutin" ; et "seront punis ceux qui auront déterminé un (!) électeur à s'abstenir de voter."

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Dissidence Morale !

Réveil Rouge de la Masse !

Le mot d'ordre actuel,
pour le salut populaire,
est bien celui-là :

Dissidence Morale !
Réveil Rouge de Masse !

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• C'est-à-dire Objection de Conscience publique et générale contre la Barbarie Intégrale dominante.

Cela revient à dénoncer la fumisterie révoltante des prétendues "valeurs" du Système : Droits de l'Homme, Acquis sociaux, Laïcité.

 

• Notre serment de Dissidence Morale met à l'ordre du jour le Réveil de la Masse du long coma dans lequel elle a sombré. Ce fut le fait de la fausse richesse et de la fausse puissance de l'Europe depuis 150 ans ; puissance et richesse qui se réduisaient au Parasitisme économique, au Banditisme politique, au Militarisme chauvin et au Colonialisme raciste.

 

• Dur réveil ! À ne pas y croire ! Qu'observent les enfants de Luther et Rousseau, en faisant un retour sur eux-mêmes ? Qu'ils se trouvent à leur tour dotés du statut de purs Indigènes Blancs, soumis à une Caste de Colons intérieurs ! Belle destinée de l'Europe des Lumières !

 

• Comment a-t-on pu en arriver là, sans presque s'en rendre compte ? C'est une longue histoire : l'effet d'une dégénérescence insidieuse, développée durant 150 ans, sous le clinquant de la "Grandeur". Cela commence vers 1850, avec le règne du Démocrate Cavaignac, puis du Fasciste Napoléon III, pour aboutir à l'"ambition" du Bloc-Europe, républicain ou impérial, des néo-Thoréziens et des néo-Gaullistes de l'An 2000...

 

• Oui, notre humiliation, notre impuissance et notre égarement, ont commencé avec l'anéantissement des "Rouges" de Février 1848 ; avec la ruine duprogramme Utopiste - Mystique/Athée - de Pierre Leroux et Auguste Blanqui : le Droit au Travail et la République Populaire. C'est bien alors qu'on chassa le Droit au Travail par le Code du Travail, qu'on élimina la République Sociale par la République Autocratique.

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- 2 -

• Mais enfin est venue l'heure où la Masse peut et doit se redécouvrir Civilisée et Adulte, comme elle en eut la velléité en MAI 68, ce lointain écho de Fév. 48. C'est qu'à présent, nous avons médité à fond la dure leçon de 150 ans de Barbarie Intégrale dominante. Maintenant, l'Utopie Rouge fondée doit vaincre et donner le jour à l'Europe Communiste !

 

• Le temps presse. C'est une course de vitesse entre la Masse Européenne pour la libération sociale, et l'Empire européen engagé dans la guerre de Bloc contre l'empire Américain rival. Qu'il se fasse vite, donc, le grand Réveil Rouge de la Masse d'Europe !

L'unité Rouge de la Masse, c'est :

Union de combat du Salarié rouge et de la Femme rouge ; du Syndicat rouge et du Féminisme rouge !

Union de combat de la Masse rouge dans le Défaitisme Révolutionnaire, pour briser le Bloc Militariste Européen en formation ; pour déjouer le piège de l'affrontement Boeing/Airbus et Dollar/Euro !

 

• La Masse rouge, Associée dans le Défaitisme, c'est la voie royale pour aller à la République Communiste d'Europe. Et notre Europe retrouvant son honneur populaire, se fera du même coup la forteresse décisive annonçant la République sociale Universelle ! Le monde sans Argent et sans Armes !

 

• Notre Église Réaliste, nous les Marxistes-Amis de Dieu, c'est à cette grande œuvre, sans précédent, que nous voulons nous consacrer !

 

ASSOCIATION ROUGE DE MASSE !

DÉFAITISME EUROPÉEN ROUGE !

EUROPE COMMUNISTE !

RÉPUBLIQUE SOCIALE UNIVERSELLE !

Église Réaliste - 2000

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Avertissement :

Nous vous rappelons que nous vivons en pays occupé :

"Les murs ont des oreilles...".