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Document – Les Acquis de Bismarck

La flamme et la cendre

Dominique Strauss-Kahn – 2002

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Bismarck et Beveridge
sont toujours vivants

Une culture européenne existe ; (…)

Cet univers commun, nous le devons beaucoup à ceux qui, de Bismarck à Beveridge, ont forgé les instruments de la solidarité sociale. Que le premier n’ait pas été à proprement parler un progressiste sur tous les sujets, voilà qui est incontestable. Qu’il ait combiné la répression contre les socialistes avec une certaine forme de socialisme d’État importe peu pour mon propos. Qu’il ait présenté enfin ses lois sociales (assurance-maladie votée en 1883, assurance-accident votée en 1884, assurance-vieillesse votée en 1889) comme une tâche de politique conservatrice destinée à détourner les ouvriers des tentations révolutionnaires ne change rien à l’affaire 3. Bismarck accouche l’Europe de ce qui deviendra l’État-providence – auquel les trois “U” de Beveridge 4 (Universalité d’application, Uniformité des prestations, Unicité des structures) donneront, soixante ans plus tard, un contenu normatif.

Dominique Stauss-Kahn, La flamme et la cendre, 2002

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3 Dans un discours du 18 mars 1882, Bismarck écrivait : “J’estime que c’est pour moi un avantage extraordinaire avoir 700 000 petits rentiers, précisément dans les classes qui, sans cela, n’ont pas grand-chose à perdre et croient à tort qu’elles auraient beaucoup à gagner à un changement.” Cité par Elie Halévy, op. cit., p. 239.

4 Beveridge (lord William Henry), économiste et administrateur britannique (1879-1963). Il fut l’auteur d’un plan de sécurité sociale (1942) et de travaux sur le “plein emploi” de la main-d’œuvre (1944). (Larousse)