“Au moment où tout le monde en France se réclame de la laïcité, les Français ne sont pas en mesure de fournir une définition identique.”
“(…) le mot laïcité est forgé pour la première fois par Littré, ou repris d’une utilisation antérieure obscure. Il apparaît dans le supplément de 1877 de son dictionnaire. D’une manière plus précise, le substantif “laïcité” ne remonte pas plus loin que 1871. (…)
En arabe “littéraire” ou “coranique”, la notion de laïcité est inexistante. (…)
(La) traduction de laïcité par ‘almâniyya a été faite à l’origine par des chrétiens arabes, au milieu du 19ème siècle, et n’est apparue dans les dictionnaires qu’à partir de 1870.”
“En France, l’idée de la neutralité a officiellement pris naissance avec la loi du 21 février 1795 2 [Thermidor !], dite de la première séparation.”
Soheib Bencheikh, Marianne et le Prophète, 1998
Qu’est-ce que la Laïcité ?
“Le concept de laïcité est à la fois très large et très étroit.
Large : il concerne en première analyse les régimes respectant la liberté de conscience, au sens où ceux-ci impliquent que l’État n’“appartienne” pas à une partie de la population, mais à tous, au peuple (laos, en grec), sans que les individus puissent être discriminés en fonction de leurs orientations de vie.
Étroit : si le terme même et le combat contre le cléricalisme religieux auquel il renvoie font fortement sens dans la tradition française, où, en plus de l’affirmation de la liberté religieuse, il renvoie à une séparation de l’État et des confessions, de nombreux autres pays, qui respectent strictement la liberté de conscience et le principe de non-discrimination, l’ignorent.”
La Laïcité, Que sais-je, PUF, 1996
“Qu’est-ce que la laïcité ? Objet de tant de passion, la définition classique du mot est étonnamment brève. À son sujet, le Littré est pour le moins laconique : la laïcité renvoie au “caractère laïque” ; est laïque “ce qui n’est ni ecclésiastique ni religieux”. La notion embrasse ainsi un espace vaste et flou et s’appréhende par contraste.”
“Si la laïcité, comme mode d’organisation de la société, peut être considérée comme un phénomène relativement récent [quelle date ?] corrélatif à l’émergence de l’État-nation, le principe même de la distinction entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel, véritable fondement du principe de laïcité, plonge ses racines dans un passé plus lointain.”
Rapport de la mission d’information de l’Assemblée nationale présidée par Jean-Louis Debré, décembre 2003
“Au moment où la France fête le centenaire de la loi de 1905, il serait judicieux de nous pencher sur une réflexion autour de la citoyenneté et de la laïcité. Celle-ci n’est point, comme aiment à le dire certains ministres de la République, “la liberté de culte”. C’est là la définition anglo-saxonne de la Laïcité. Au-delà de la séparation de l’Église et de l’État, la laïcité est avant tout le droit de croire ou de ne pas croire. Ce droit républicain inaliénable est celui de tous les citoyens, y compris ceux qui professent la foi musulmane.”
Le Figaro, 15 février 2005
“Après l’effondrement de l’empire de Napoléon III en 1870, l’écrasement de la Commune de Paris et les échecs des tentatives de rétablissement de la monarchie, une majorité républicaine s’installe aux commandes en 1879. Cela va permettre l’adoption d’une série de mesures en faveur de la laïcisation (…).
Cette stratégie républicaine s’accompagne d’une volonté d’éviter toute guerre civile (…).
La laïcisation de l’enseignement effectuée, fallait-il aller vers la séparation des Églises et de l’État (…) ? Les républicains hésitent, d’autant qu’un nouveau pape, Léon XIII, élu en 1878, adopte une attitude conciliante à l’égard du régime républicain. (…) le texte de Léon XIII traduit (…) le désir de certains catholiques et des monarchistes modérés d’unir leurs efforts avec les républicains modérés pour combattre le nouveau péril, le socialisme.”
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2 La première séparation qu’a connue l’Histoire a eu lieu aux ÉtatsUnis d’Amérique en 1791, sans atteindre la neutralité totale.
Nous vous rappelons que nous vivons en pays occupé :
"Les murs ont des oreilles...".